Extrait du journal
•is 15 JUILLET. POURQUOI LA DISSOLUTION DOIT-ELLE AVOIR LIEU? La session est close, et l'on se demande plus sérieusement que ja mais si la chambre qui-se retire officiellement aujourd'hui, conservera ses pouvoirs une année encore. Le Journal des Débats, qui veut bien enfin comprendre que cette question est à l'ordre du jour, la traite du bout des lèvres, et dédaigne de conclure. On ne sait pas, après avoir lu son article, si cette feuille est pour où contre la dissolution, ou, plutôt on reconnaît que ses sympathies doctrinaires sont, sur ce point, en contradiction manifeste avec ses sympathies ministérielles. H est bien difficile de servir deux maîtres, et quand l'un dit oui, l'autre non, on risque de les mécontenter tous deux, en ne disant ni non, ni oui. C'est qu'en effet, à mesure que la coterie insiste davantage pour conserver la chambré, on se prononce de plus en plus pour la disso lution dans le camp ministériel. L'utilité, la nécessité même delà mesure sont si évidentes, qvje les hommes les plus indécis commen cent à avoir une opinion, et nous n'en voudrions pour preuve que cette réserve même du Journal des Débats, qui n'eût pas demandé mieux que rompre une lance en faveur de ses anciens amis, s'il n'eût pas craint de blesser ses amis de fraîche date. Toutefois, et eomme dédommagement à sa neutralité forcée, cette feuille, attaque aujourd'hui avec véhémence les argumens sur lesquels la presse s'est fondée pour demander la dissolution. L'opposition a fait, de la législature élue en 1834, un portrait peu flatté, mais vrai, et qui soulève toutes les colères du Journal des Débats. Peu lui importe qu'on dissolve la chambre, pourvu qu'on reconnaisse que, placée dans des circonstances difficiles, elle a fait preuve d'une sagesse, d'une prudence, d'une mesure, qui ne s'étaient jamais rencontrées dans les assemblées précédentes ; qu'elle a su contenir l'esprit révo lutionnaire j ce que n'ont su faire ni la constituante ni la convention ; qu'elle a rétabli l'ordre sans ouvrir un chemin au despotisme, ceque n'ont su faire ni les législatures du directoire et du consulat, ni cel les de la restauration et de l'empire. A ce brillant panégyrique des intentions et des actes , la feuille doctrinaire ajoute un éloge non moins pompeux des personnes. Jamais , à l'entendre, assemblée lé gislative n'avait donné asile à tant de noms illustres, jamais l'ensem ble des discussions n'avait été aussi parfait. Qu'on ne nous parle plus de cette éclatante assemblée constituante, qui, jusqu'ici, était demeu rée sans rivale pour la magnificence de sa parole et la grandeur de ses vues ; la législature de 1834 la dépasse de toute la supériorité de M. Guizot sur Mirabeau. En vérité, s'il y avait dans tout cet hyperbolique étalage le moindre fondement, nous serions insensés de vouloir la dissolution; et le Jour nal des Débats lui-même aurait vraiment bien delà bonté de s'arrêter à quelques misérables fautes de détail, quand l'ensemble a produit tant de merveilles. Mais les habitudes rhétoriciennes de la grave feuille l'ont poussée, cette fois, jusqu'à la limite du ridicule, et l'exagération de ses éloges ne pourrait avoir pour résultat que de faire la chambre plus petite qu'elle n'est. H y a plus : c'est qu'à envisager les choses du point de; vue historique, et sans parti pris politique, le Journal des Débats , qui exalte ce qui ne soutient pas l'examen, censure précisément ce qu'on pourrait louer. Dans Pœuvre parlementaire, les détails ont été remarquables, l'ensemble seul a complètement manqué. La chambre, qui possède, nous l'avons dit, plus d'un orateur éminent, et bon nombre de spécialités très-distinguées, s'est honorée par de magni fiques discours de tribune et par de beaux travaux de commis sions. Qu'a-t-il manqué pour mettre dans tout leur jour ces esti mables côtés de la législature ? une vue d'ensemble, une pensée commune et courageusement poursuivie. La chambre n'a pas eu ce qui, pour les corps comme pour les individus, est la condition indis pensable d'une vie indépendante et forte, elle n'a pas eu de ca ractère. Jamais elle n'a rien su vouloir, ; elle a eu des majorités pour tout le monde, et cette mollesse de conscience est le plus grand tort qu'ellp, ait pu avoir dans notre temps de convictions indécises. Nous avons éxpliqué pourquoi la chambre était ainsi faite, et pourquoi, le mal étàit irrémédiable, si l'on ne recourait à la dissolution. Qu'on nous permette dè dire un dernief- mot sur une des causes, à nos yeux, la plus grave de toutes, qui ont amené ce déplorable état de choses. Le pays n'a pas oublié la courageuse persévérance avec laquelle un honorable député, M. Gauguier, poursuit son œuvre de réforme par lementaire, car il y a en effet, toute une réforme dans la proposition qu'il soumet chaque année à ses collègues, et que chaque année ses collègues s'empressent de réjeter. M. Gauguier veut interdire l'accès. de la chambre à ce débordement de fonctionnaires publics qui en vahissent ses bancs. Il dit, à ce sujet, des choses fort simples, fort sensées, qui font rire ou murmurer la chambre, mais qui sont fort bien comprises et fort approuvées par le pays. Il dit que, pendant que MM. les fonctionnaires siègent au Palais-Bourbon, la besogne judiciaire , administrative, militaire qui leur est confiée, ne se fait pas ou se fait mal, et que le service public est en souffrance. Si on nie le fait, il affirme alors, avec pleine raison, qUe les fonctions étant aussi bien remplies par les doubles des députés, il faut supprimer les chefs d'emploi. Il ajoute que le budget est très-mal contrôlé par ceux qui consomment le budget, et que le ministère est très-mal surveillé par ceux qui dépendent du ministère. Ce sont là des vérités tellement vraies, qu'elle? ne se démontrent pas, et que, pour y répondre, il n'y a d'autre expédient que de rire ou de se fâcher, èn se bouchant les oreilles. Les recherches statistiques de l'honorable député nous ont révélé qu'il y avait à la chambre 178 fonctionnaires en activité de service, auxquels il est bon d'ajouter il fonctionnaires retirés. S'étonnera-t-on ensuite si la chambre a une- majorité toujotif» prête pour tous les mi...
À propos
Le Constitutionnel fut un quotidien politique sur quatre pages, fondé par Fouché et une quinzaine d’actionnaires, pour la plupart contributeurs du journal. D’abord bonapartiste, il s’agissait d’un organe puissant jusqu’à la naissance du Second Empire, rassemblant bonapartistes, libéraux et anticléricaux. Marqué par la personnalité d’Adolphe Thiers, le journal rendait compte des informations diplomatiques européennes, mais discutait également de l’actualité politique française.
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