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Le Constitutionnel, 16 juin 1845

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Le Constitutionnel
16 juin 1845


Extrait du journal

révolution et l'enivre avaient légué à la restau ration. « Sans doute, dit le rapporteur , pendant » ces quinze années de paix, la France a fait de » grandes choses ; mais qu'elle sache bien à quel » prix elle les a faites. » Il eût été à désirer que l'on nous fît'connaître les grandes choses qui ont été réalisées , afin qup chacun pût juger si elles n'ont pas été payées trop cher. Depuis 1830 , le produit annuel des impôts s'est accru de 500 mil lions; la France s'est endettée de 1,500 millions en rentes consolidées , et de 5 à 400 millions en dettes exigibles. Si on a fait réellement de gran des choses à ce prix-, il ne nous est nullement dé montré qu'on nous en ait donné pour notre ar gent. îîlais, nous nous hâtons de le dire, notre gou vernement ne nous revient pas tout-à-fait aussi cher qu'il le dit, et il y a dans ces gros chiffres une sorte de mirage de comptabilité dont résulte une fâcheuse illusion. Dë ces 61 millions de rentes re levés par la commission du budget, il convient, pour rester dans le' vrai, de déduire environ 27 millions provenant d'un assez ridicule mécanisme de chiffres auquel on a donné le nom de consolida tion. Les fonds de l'amortissement, qui ne sont pas employés à racheter les rentes dont le cours dé passe le pair, sont appliqués à d'autres dépenses, et notamment à l'extinction du déficit des budgets. Jusque là, rien de plus raisonnable; ces fonds pro cèdent de l'impôt annuel/ et leur destination na turelle, à défaut du rachat de la dette, est l'acquit tement des dépenses annuelles. Ce qui serait sou verainement absurde, s'il n'y avait une raison cachée que nous dirons toul-à-l'heure, c'est la fic tion qui considère l'amortissement, qui n'est autre chose que l'état, comme un capitaliste prêtant ses fonds à l'état, et lui attribue en conséquence, en échange de ce qu'il verse chaque année dans le gouffre du déficit, une inscription de rente qui vient s'ajouter à la dette publique. Voici comment se fait la chose. Tous les jours, la main droite de l'état (le trésor) verse dans la main gauche (l'amortissement) une fraction de la dotation inscrite au budget. Tout aussitôt, la main, gauche reverse la même somme dans la main droite, à titre de prêt'à échéance déterminés, en échange d'un bon du trésor. Elle enliasse avec soin tous ces coupons, et quand elleen a réuni l 80, par suite de cette plaisanterie renouvelée chaque, jour, pendant six mois, avec un sérieux impertur bable, elle restitue à la main droite cette masse de papiers qui sont alors annulés, et l'on inscrit au grand-livre, au nom de la main gauche, un capital équivalent, représenté par des rentes 3 0[0 au cours moyen des six mois. Et remarquez que ces rentes créées au prix de tant de formalités, d'écritures et de puériles paperasseries, sont en' définitive une pure fiction, puisque nul n'est dé biteur envers lui-même, et que l'état qui les paye, peut les détruire quand il voudrai La raison occulte de tout ce tripotage, la voici. La politique dominante a besoin que nos finances soient toujours embarrassées, d'abord pour ras surer l'étranger sur le réveil possible de l'esprit national, en nous plaçant dans un état permanent d'impuissance ; secondement, pour avoir une ré ponse toute prête aux demandes de réformes, aux quelles on ne peut opposer que l'apparente im possibilité d'y satisfaire. De là, cette invention d'un amortissement qui, croissant d'année en an née, absorbe une partie des augmentations du re venu public, et qui sert, non à diminuer la dette, mais à l'accroître. La commission du budget a constaté que, depuis 1833, l'amortissement s'était progressivement éle vé de 63 à 104 millions. L'année prochaine il atteindra 109 millions. « Ces chiffres, dit-elle, « méritent de fixer l'attention de la chambre; » elle aura à se demander un jour s'il ne doit pas » être posé une limite à Ta progression et à la » puissance de l'amortissement. » C'est là, en effet, une question grave, mais qui nous semble mal énoncée. Parler d'arrêter l'amortissement dans son progrès naturel, c'est le dépouiller de son prestige, au détriment du crédit public dont il est l'un des plus solides appuis. Ce qu'il faut dire, c'est qu'il est urgent de liquider le grand-livre de la dette S 0/0; c'est que cette dette éteinte et rem...

À propos

Le Constitutionnel fut un quotidien politique sur quatre pages, fondé par Fouché et une quinzaine d’actionnaires, pour la plupart contributeurs du journal. D’abord bonapartiste, il s’agissait d’un organe puissant jusqu’à la naissance du Second Empire, rassemblant bonapartistes, libéraux et anticléricaux. Marqué par la personnalité d’Adolphe Thiers, le journal rendait compte des informations diplomatiques européennes, mais discutait également de l’actualité politique française.

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