Extrait du journal

Je ne puis songer, sans rire, à la figure que doivent faire les auteurs lorsqu'ils s'en viennent gravement, leur manuscrit sous lé bras, lire de pareilles inepties. Eli quoi ! pas une idée, pas tin mot, pas l'ombre même de cet'esprit vulgaire et banal qui court les rues, pas un de ces calembours par à peu près qui traînent dans les ruis seaux, pas une drôlerie et pas une extra vagance; absolument le vide et le néant 1 Ce n'est pas vraiment difficile que d'être auteur à "ce compte, et j'admire que dos gens très habiles et très spirituels consen tent, de galté de cœur, à s'ellacer. aussi complètement qu'ils le font, par un in croyable oubli d'eux-mêmes, ou par une bravade et un défi jeté au sens commun. . 11 est vrai que les acteurs du Palais-Royal sont les premiers bouffons du monde.. Donnez-leur un canevas très nul et très plat, le scénario le plus informe et le plus dé cousu, comme leurs devanciers de la Com media dell' Arte, ils improviseront leur* rôles, ils inventeront leur dialogue, ils feront leurs mots, ils brûleront les plan ches, et tout à coup, parce que' telle est leur volonté et leur bon plaisir, ils vous créeront, séance tenante, une action vrai semblable et comique^ des types vivans et réels, une satire acerbe et violent, d'un des plus grands ridicules, pour ne point dire une des plus grandes hontes de notre époque. Il existe à Paris, parmi les autres plaies sociales qui infectent les grandes villes, des créatures abjectes, laides, sales, qui, après a.voir traîné leurs loques dans tous les carrefours, après avoir usé sur l'asphalte leurs bottines éculées, éprouvent le besoin de sortir, non pas de leur fange, mais de leur obscurité et de leur misère. Rien n'est plus aisé, et voilà comme elles s'y pren...