Extrait du journal
C'est énoncer un lieu commun que de dire que la validation des élections se fait dans les bureaux avec une légèreté éton nante. On l'a cent fois prouvé, mais, ce pendant, une preuve supplémentaire doit en être donnée au public par l'exposition résumée du « cas Frédéric Brunet ». Le neuvième bureau, avons-nous dit, où figuraient, à côté de socialistes et même de communistes notoires, un grand nombre d'hommes intègres, n'a point hésité à te nir pour nulle et non avenue la protesta tion de M. Fourès contre l'élection de M. Brunet. Le dossier qu'il avait en sa possession était pourtant assez précis et assez lourd pour retenir son attention distraite. On lui a signalé qu'un certain nombre de jeunes gens appartenant à la classe 1926 et encore sous les armes avaient pris part au scrutin dans des conditions assez mystérieuses puisqu'il a été impossible de retrouver ces "votants militaires aux adresses inscrites sur les listes électorales.' On lui a signalé, par ailleurs, qu'à la 4e et à la 7" section de vote, le nombre des émargements accu sait 1651 et 1675 votants alors que le total des suffrages a été de 1653 et de 1678 ! Misère que cela, .mais il y a plus im portant : Au premier tour de scrutin, M. Frédéric Brunet, républicain socialiste, avait obte nu 4716 voix, M. Fourès, candidat d'Union nationale, 4711, M. Mons, communiste, 3201 voix, et M. Villaret, socialiste S.F.I.O., 784 voix. Au second tour, M. Villaret se désista pour M. Brunet, mais M. Brunet ne s'illu sionnait point : il savait que le petit lot de suffrages qui lui viendrait de ce désiste ment ne compenserait pas les voix des abstentionnistes du premier tour qui iraient à M. Fourès. L'ancien vice-président dé la Chambre chercha alors un appui chez les sympathisants communistes. Et voici comment il s'y prit. Le 29 avril, une heure avant l'ouverture des sections de vote, il faisait recouvrir tous les pan neaux de l'arrondissement d'une affiche intitulée : « Aux sympathisants » et dont le texte était de nature à jeter la confusion dans l'esprit des électeurs d'extrême-gau che. La manœuvre réussit à souhait. Trompés par cette affiche, placée sous l'enseigne de l'Humanité, placard qui n'était qu'une philippique contre l'Union nationale et se ter minait par ces mots :•« Si,.vous Voulez batIre le candidat nationaliste, vous qui avez voté pour Mons au premier tour, votez pour Frédéric Brunet. », les ouvriers ex trémistes portèrent naïvement leurs bulle tins à l'homme habile qui les avait pipés. Renseignés dans la suite, ils ont protesté contre un tel procédé. Cette pratique inadmissible viciant une élection qui, sans elle, eût été fort proba blement défavorable à M. Brunet, lé neu vième bureau ne l'a point retenue. Il a pas sé outre... Et pourtant, à la dernière heu re, cette validation que « l'élu » attendait, haletant, n'a point été prononcée. La Cham bre n'a pas osé persifler si grossièrement la probité et la justice. Elle a demandé à se recueillir, à contrôler, à examiner. Ainsi, elle a su racheter, à la minute dé cisive, la négligence regrettable de plu sieurs de ses membres. Elle s'est montrée sage. Elle devra demain se montrer équita ble en annulant une élection qui relève peut-être de l'art des saltimbanques, mais qu'une assemblée d'honnêtes hommes ne saurait confirmer. Henry Vidal....
À propos
En 1854, quatorze ans après la disparition du petit journal subversif du temps de Charles X, Hippolyte de Villemessant relance Le Figaro. Paraissant d’abord sous la forme d’une petite feuille de chou littéraire, Le Figaro absorbe L’Événement en 1866 pour devenir, sans transition, le grand quotidien conservateur que l’on connaît. Dès les années 1880, il abandonne la cause du monarchisme pour adhérer aux principes républicains.
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