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Le Figaro, 6 avril 1935

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Le Figaro
6 avril 1935


Extrait du journal

LES JOURS SE SUIVENT QUESTION DE PUDEUR... Cettè salle de danse située non loin d'un pont qui commémore une victoire française m'invite à aller contempler, ce soir, la naissance de Vé/ïux-1935. C'est beaucoup d'honneur. Je ne savais pas que Vénus renaissait ainsi tous les ans et qu'il fallait, chaque printemps, la ressaisir aux eaux parisiennes. Elle n'est pas, d'ailleurs, la seule découverte de cette soirée. Je vois qu'on doit y désigner aussi la plus « jolie chanteuse nue ». Et pour le cas où ma pudeur se cabrerait, l'invitation précise que si le concours est international, la présentation, elle, restera dans le cadre du bon goût « de la tradition française »... A la bonne heure ! Du moment que la tradition française est en jeu comment douter un seul moment de Vexcellence de ce divertissement ! Suprême référence : la même invitation (il n'en coûte que dix francs par personne) assure que le jury de cette Vénus-1935 et de cette « plus jolie chanteuse nue » sera composé « par les personnalités les plus en vue des arts, des lettres, du cinéma et du théâtre ». Je vois mal, par avance, cette réunion. Je vois mal ce jury des arts et des lettres, ces Vénus, ces chanteuses nues dans la grande salle réchauffée par un orchestre et des lampes à arc. Les chanteuses nues surtout... Je ne puis me les figdrer comme des nymphes, heureuses et rayonnantes... Si clair, Leur incarnat léger qu'il voltige dans l'ifir... Cela c'est de la poésie. Mais ce qui vol tigera dans l'air, j'en ai peur, ne sera pas un incarnat léger, mais de pesantes chan sons et des gestes sans divinité. En som mes-nous donc encore là ? Voilà ce qu'un samedi de Paris offre aux habitants du 7" arrondissement : l'élection de la Vénus1935 et de la plus jolie chanteuse nue... On risque toujours un peu de ridicule à s'offusquer. Mais il faut accepter parfois les inconvénients du métier de moraliste. Eh bien, devant cette invitation, je me sens irrité, et quitte à passer pour un rien ridicule, je m'offusque. J'ai envie de dire à ces gens : « Pourquoi ne laissez-vous pas ces dames habillées. Il fait si froid. Et d'abord, avons-nous besoin d'une Vénus, d'une chanteuse nue ? Et déshabillant ces personnes, pourquoi invoquez-vous la « tradition française » ? Oui, pourquoi ?... Il est vrai que ce petit discours ne servi rait à rien. Mais comprenez du moins que je ne fasse, pour ma part, qu'un emploi surveillé de l'expression : « tradition fran çaise ». Question de pudeur... Guermantes....

À propos

En 1854, quatorze ans après la disparition du petit journal subversif du temps de Charles X, Hippolyte de Villemessant relance Le Figaro. Paraissant d’abord sous la forme d’une petite feuille de chou littéraire, Le Figaro absorbe L’Événement en 1866 pour devenir, sans transition, le grand quotidien conservateur que l’on connaît. Dès les années 1880, il abandonne la cause du monarchisme pour adhérer aux principes républicains.

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