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Le Figaro, 7 février 1872

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Le Figaro
7 février 1872


Extrait du journal

j'ignorais, et dont il vaut mieux ne pas ! parler. ; Je répondais pan un langage d'apaise ment et de conciliation ; ce qui est bien facile, car on a toujours assez de forces pour supporter les maux d'autrui. Mais, faut-il le dire ? je trouvais là ces livres, ces brochures, ces journaux, écrits pour souffler le mécontentement, la jalousie, la révolte et la haine, et que l'on devrait clouer au pilori car, en face de l'étranger, c'est véritablement infâme ! Ce n'est pas que j'approuve le gouver nement en cette affaire. Je crois que la situation était terrible; mais que, dé tous les moyens, il a choisHe plus mauvais. Je crois que là, comme dans les choses de la politique, il a manqué d'initiative et de décision, s'avançant à tâtons sur une route, sans pouvoir dire lui=même où il allait... Je crois que, de même qu'il ne fallait traîner trente mille misérables sur les pontons pour nous les rendre une fois qu'ils seraient plus exaspérés que jamais, de même il ne fallait pas laisser des offi ciers porter leurs épaulettes pendant une année entière, puisqu'on devait finir par les leur arracher. Je persiste à affirmer qu'il valait mieux faire ce que j'avais conseillé jadis : de mander à la Chambre un sacrifice d'ar gent, augmenter les cadres, donner des grades à l'armée d'Allemagne, en enlever un peu à l'armée de province; en un mot, rétablir J'équilibre sans arriver à un im mense mécontentement. Enfin, lesjchoses sont faites: il faut donc les subir. Mais -tout ce que je demande, c'est qu'on respecte une armée qu'on a traitée de la sorte. Que tous les honnêtes gens, que tous les hommes de cœur se disent bien en voyant un ! officier aujourd'hui : Morale ment, c'est un blessé. La blessure ne se voit pas, mais elle n'en est que plus cruelle ! On n'oserait pas aller insulter des malheureux qui seraient là gisant sur un champ de bataille... et cependant, c'est ce qui se passe aujourd'hui! Presque tous sont des blessés : blessés dans leur car rière, dans leur honneur, dans leur passé, dans leurs espérances I... Je sais bien que cette foule imbécile qui ne salue jamais que le succès, que cette foule qui jadis nous acclamait à notre retour d'Italie, sera toujours prête à insulter les glorieux vaincus de Frœschwiller, dé Gravelottes et d'Héricourt. «* Je sais que les vaincus ont fini par tremper dans cette immense injustice ; que découragés, brisés par la défaite, ils ont douté, d'eux-mêmes, et que parfois ils ont été injustes les uns pour les au tres... Il y a bien des discours que j'au rais voulu ne pas entendre, bien des bro chures que je n'aurais jamais voulu lire! Mais il faut songer à leur situation : ils ne sont pas dans leur équilibre. Et comment y seraient-ils après tant d'é preuves? Savez-vous ce qui s'est passé ? savezvous ce qu'ils ont souffert, ces officiers de la vieille armée menés à un désastre iné vitable,. se battant comme des lions, traî nés pendant six mois chez un ennemi mortel, qui ne leur a épargné aucune honte; et à leur retour, cherchant leur armée, retrouvant à la place le chaos, la confusion ; et pour toute récompense n'ayant même pas les grades qu'ils au raient eus en temps de paix? Et, en face d'eux, les officiers de l'ar mée de province, qu'un avocat a couverts de galons, qui ont poussé le sentiment du devoir au point de se battre sous les ordres d'aventuriers, et à qui l'on vient dire au bout d'une année : Ces grades avec lesquels vous vous êtes battus contre les Prussiens et ensuite contre la Commune, ces grades que nous avons trouvés bons pour vous faire tuer, ne sont plus vrais aujourd'hui : nous vous les. arrachons ! Savez-vous que cela ,ne s'était jamais vu? savez-vous que jamais on n'avait en tendu parler d'officiers dégradés sans avoir commis.de crime? Et vous voulez qu'ils soient dans leur équilibre! et vous vous étonnez de cer taines paroles ! Mais là situation est criante ! mais la plaie saigne encore !...

À propos

En 1854, quatorze ans après la disparition du petit journal subversif du temps de Charles X, Hippolyte de Villemessant relance Le Figaro. Paraissant d’abord sous la forme d’une petite feuille de chou littéraire, Le Figaro absorbe L’Événement en 1866 pour devenir, sans transition, le grand quotidien conservateur que l’on connaît. Dès les années 1880, il abandonne la cause du monarchisme pour adhérer aux principes républicains.

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