Extrait du journal

On ne circule ici que la nuit. Si vous voulez aller au front, il faut quitter Rovaaniemi sous les étoiles pour arriver aux lignes avant le lever du jour. Mais, au cercle polaire, les- nuits, sont un éblouissement, comme si la lune s'employait à parer à la carence du soleil. Hélas ! à peine a-t-on fait quelques kilomètres qu'un écran s'in terpose entre le voyageur et le paysagé. Il y a déjà une couche de glace de cinq millimètres d'épaisseur sur les vitres de la voiture, à l'inté rieur aussi bien qu'à l'extérieur. Un souffleur d'air chaud est à peine suffisant pour maintenir sur.le pare-brise un espacé libre devant lés yeux du chauffeur. Ce dernier a emporté une spa tule de vitrier avec laquelle, de temps en temps, il déglace sa fenêtre. Cette lucarne s'ouvre sur un décor de féerie. Imaginez une grande allée toute blanche qui va se. perdre dans le ciel. De chaque côté, une haie de sapins de toutes tailles, enveloppés d'une neige que la lune rehausse de tons dorés. Bien tôt, ce n'est plus des arbres que l'on voit, mais les personnages d'une fête à la cour. On s'avance parmi des vertugadins ployés pour une révé ré rice, entre dès cavaliers blancs qui saluènt /de leur bicorne d'hermine. Adorable détour des choses : des pages vêtus de satin'vous ouvrent Its portes de la guerre. (Suite page 3, colonnes 4 et S)...