Extrait du journal
Donc après Thermidor, et Brumaire et Décembre, Il s'en trouve encore Un pour égorger la Chambre, Et ce dur châtiment en ce jour éclata, Qu'après un Bonaparte on eût un Gambetta. — Ce siècle avait quatre ans, quand l'homme au menton glabre Mettant sur notre crâne et sa botte et son sabre, Sans remords, pour complaire à son ambition, Egorgea lâchement la Révolution : \ Dans les sombres brouillards, obscurcissant Brumaire Ce fils — noir parricide — assassina sa mère. Un autre — celui-là, Cosaque moustachu — César aussi, César minuscule et déchu, — Après avoir jeté la justice à la Seine Et violé la France en une orgie obscène, Dix-huit ans s'est vautré dans son crime impudent Qui, commencé par Ham, a fini par Sedan. Et maintenant encor mon regard et mon âme Pour la troisième fois ont vu le même drame. Pour la troisième fois, moi, si près de la mort, L'infâme Gambetta me fait le même sort ! Et, sortant de l'Enfer, la Muse vengeresse Revient et, m'arrachant de force à ma vieillesse, Arme du fouet vengeur mon bras endolori Et me dit : u — Cloue encor cet Autre au pilori! » — Oh ! celui-là, cet homme à l'œil unique, épave De ces Italiens à la lèvre qui bave!.. Gambetta... Bonaparte... Ah! c'est trop à la fois Dans un seul siècle. Après le Corse, le Génois. Oh ! le dernier, surtout. Suivant sa route oblique, 11 t'a charmée, ô vierge ! ô chaste République ! Tu lui fis une place à ta table, en ton lit... Et ce Don Juan — ma plume en écrivant pâlit — Ignorant les douceurs saintes de la famille, T'a prise, 6 République ! et t'a traitée en fille. . Puis, quand son premier feu se fut évanoui, Quand il l'eut abusée et qu'il en eut joui, Il la jette au trottoir et veut la mettre en carte. — Ce sont là les façons de monsieur Bonaparte. — Mais, s'il le pouvait, lui, Gambetta, j'en réponds, N'est pas homme à porter la casquette à trois ponts. — Soit pourtant, va, jouis, Néron, Sardanapale, Exploiteur engraissé du prolétaire pâle, Hérode de Charonne et de Ménilmontant, Satrape, czar, pacha, prince, hospodar, sultan ! Va, que du boulevard le pâle réverbère Te regardant passer, dise : « Tiens, c'est Tibère ! » Et qu'il ajoute encore, après réflexion : « Je croyais voir Brutus et c'est Trimalcion!..» Gambetta ! Gambetta !.. Que le remords sévère Te poursuive à jamais au fond de ton repaire ! Moi, j'ai soixante-dix-neuf ans passés : à Dieu Auquel j'ai toujours cru, j'adresse un dernier vœu: C'est de vivre assez vieux de cervelle et de plume Pour te broyer les os sous un nouveau volume Et pour voir — justicier et poète inclément — Sous mon vers enflammé, rougir ton front fumant 1...
À propos
En 1854, quatorze ans après la disparition du petit journal subversif du temps de Charles X, Hippolyte de Villemessant relance Le Figaro. Paraissant d’abord sous la forme d’une petite feuille de chou littéraire, Le Figaro absorbe L’Événement en 1866 pour devenir, sans transition, le grand quotidien conservateur que l’on connaît. Dès les années 1880, il abandonne la cause du monarchisme pour adhérer aux principes républicains.
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