Extrait du journal
BILLET à une-dame de province Vous me reprochez, madame j avec infini ment d'esprit, de préférer la mode anglosaxonne à la nôtre ; vous aimeriez que revînt chez nous l'usage de donner, dans la rue, le bras aux dames, et vous évoquez.le temps passé où l'on voyait les marquis et les marquises s'en aller «ainsi liés, vers les bosquets de Trianon et la Laiterie ». Prenez garde, madame ; nous allons tomber dans la littérature. Eh, oui 1 je reconnais qu'une marquise et un marquis, bras dessus : bras, dessous, pou drés et beaux, peuvent composer, en costumes « du temps », le plus joli. pastel du monde ; et qu'au théâtre, . avec ! un air de Boccherini piqué sur le clavecin, en sourdine, cela fait des défilés, délicieux. Je ne nie même pas 'qu'habillés, à .la mode de 1840,' monsieur et madame Denis "n'avaient une espèce de 'grâce, quand ils passent,. le dos courbé,, .trottinant 'aji bras l'on.de,l'autre... Mais ce jn'.est pas' de ces gens-là qu'il s'agit, madame. Il s'agit de nous, qui ne sommes ni des bourgeois roman tiques ni des marquis. Il s'agit de votre mari et du mien;, de nos parents, de nos amis, de vous ; et de ; moi couples variés, composés d'époux gras et maigres, longs et courts, unis par l'affection la plus tendre et souvent, au. physique, mal assortis tout de même... Faites marcher, côte à, côte, les mains libres, ces époux-là,; personne ne fait attention à eux. Qu'ils s'accrochent par les bras, et tout de suite nous remarquons que ces couples com posent un ensemble sans harmonie ; qu'il est trop gros pour elle ; 'qu'elle est trop grande pour lui ; qu'ils semblent éprouver une gêne à marcher du, même pas. Et comme rien ne m'est plus pénible que de voir - d'honnêtes gens qui s'aiment exposer aux railleries du passant le spectacle sacré de leur tendresse, je pense : « Pourquoi ne se. lâcheiit-ils point ? > Cet homme et cette femme tiennent à m'indiquer, en se ténant par les bras, qu'ils sont unis par le mariage. Mais qu'est-ce que cela me fait ? En quoi ce détail.me regardert-il ? Et voilà, madame, pourquoi je ne donné jamais, dans la' rue, le bras à mon mari, que j'adore, mais ^ui est un peu plus petit que moi£—Sonia. '...
À propos
En 1854, quatorze ans après la disparition du petit journal subversif du temps de Charles X, Hippolyte de Villemessant relance Le Figaro. Paraissant d’abord sous la forme d’une petite feuille de chou littéraire, Le Figaro absorbe L’Événement en 1866 pour devenir, sans transition, le grand quotidien conservateur que l’on connaît. Dès les années 1880, il abandonne la cause du monarchisme pour adhérer aux principes républicains.
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