Extrait du journal

LES LIMITES DU. RIRE Quelques jeunes gens — dont plu sieurs sont des artistes appréciés — .se sont offert, avant-hier, le régal d'une plaisanterie peu banale.* Comme les petits garçons jouent .aux. soldats, comme les petites filles jouent à la dame, ils avaient imaginé de jouer « aux bandits ». Rien ne réjouit plus, on le sait, certains artistes que d'« épater le bourgeois ». Nous reconnaissons vo lontiers qti à ce point de vue l'inspiration fut heureuse et que le bourgeois lut « épaté », cette fois, comme il ne l'avait pas été depuis longtemps. Entassés dans une automobile... grise, bien entendu, bizarrement vêtus, armés de vieux pistolets, d'escopettes et de tromblons hors d'usage, qui donnaient à quelque distance l'horrifique impression d'un arsenal véritable, ces jeunes gens durent s'amuser beaucoup, de la stupeur causée çà et là par leur apparition joyeuse. Ils nous ont fait visite, ainsi qu'à plusieurs de nos confrères, et nous aurions mauvaise grâce à prendre au tragique une plaisanterie qui n'était des tinée qu'à faire-rire. • ; Cependant, — et bien que rire soit le propre de l'homme; >et qu'un auteur dramatique, dont, nous nous, honorons de suivre les conseils et d'aimer l'esprit, recommande,quelque pari à ses conci toyens de rire de .tout,- de peur d'être obligés d'en pleurer, — ne semble-t-il pas que tout de même le droit de rire ait des limites?;. Ces joyeux bandits d'avant-liier sont des hommes- d'infiniment d'esprit, et sûrement aussi des hommes de cœur.. Pourtant, en jouant à l'assassin, en pa rodiant-la plus tragique des actualités, ils n'ont pas pensé un instant aux deuils, aux calaslrophes 'familiales,. malheufeusetnènt très réelles, dont cette pa...