Extrait du journal

J'ai dit hier ce qu'avait été la lecture ■des Avariés au. théâtre Antoine. L'œuvre de M. Brieux, parfaitement honnête en ses intentions, décente et mesurée en son expression, a été acclamée. C'est, tantôt dans la forme dramatique tantôt et pilus' souvent. dans la forme d'une .conférence dialoguée, un réquisitoire en règle contré l'ignorance et la .pruderie du public et contré l'inaction du pou voir* qui ne savent ni nous prévenir des ravages que causent parmi nous les fléaux du mal qu'on ne nomme pas dans la langue mondaine, de l'alcoolisme et de ia tuberculose — trois calamités unies comme les trois Parques antiques — ni nousendéfendre. On peutvarier d'opinion sur les mesures à prendre pour combattre ces, maux. Mais les signaler, montrer leurs : ravages, proposer des remèdes •contre eux, 'est certainement faire œu vre d'honnête homme et — je ne dis pas de socialiste — mais de sociologue avisé ^Cependant, la censure a jugé qu'il n'é tait pas. possible de laisser jouer, dans une salle de théâtre ouverte à tous, cette pièce qui roule tout entière sur le mal que j'ai dit. De ceci, le public d'invités du théâtre Antoine a paru s'indigner. Trois ou quatre députés qui se trouvaient là — par pur hasard? — ont profité de l'occasion qui leur avait été préparée de goûter les joies de la basse popularité, chères aux démocrates de notre temps. Ils nous ont promis, emphatiques et bredoùilleurs, la suppression de la censure. Je gage que la promesse ne sera pas tenue et, que la censure restera debout, éteint une nécessité de notre état social aussi bien qu'une garantie utile pour les auteurs et les entrepreneurs de spec tacles qui, si elle était supprimée, ne demeureraient pas trois mois sans de mander qu'elle soit rétablie....