PRÉCÉDENT

Le Figaro, 14 octobre 1897

SUIVANT

URL invalide

Le Figaro
14 octobre 1897


Extrait du journal

C'est au Conseil des ministres de ce matin, qu'il va être pourvu à la vacance de < la Pré fecture ». Car c'est ainsi que, dans le lan gage administratif, on appelle la préfecture de police. Pourquoi la préfecture de la Seine S'apr pelle-t-elle, tout au long, « la préfecture de la Seine », et la préfecture de police simplement « la Préfecture » ? Ce sont les petites bizarreries de l'argot, car même dans les hautes sphères, il y a un argot spécial. « La Préfecture », cela a quelque chose de mystérieux, en quelque sorte d'anonyme qui répond bien à l'idée qu'on se fait de cet im mense confessionnal où, tous les jours, tant de secrets sont chuchotés, tant de plaies sont mises à jour, tant de scandales sont étouffés et tant de douleurs sont guéries. Car on aurait tort de ne se représenter ja mais le préfet de police que comme une ma nière de soldat administratif qui va aux incen* dies, se jette dans les bagarres, arrête les ma nifestations, et passe son temps dans la rue à la tête de ses troupes. Il y a, dans ces fonctions si complexes, une partie qui est bien plus délicate et plus haute. Un vieux routier de la maison disait que pour faire un bon préfet de police, il faut avoir à la fois des qualités militaires et sacerdotales. Cela ne se rencontre pas toujours chez le même homme. Mais il est bien certain que le cabinet du préfet de police a entendu bien des révéla tions, bien des secrets de famille, et que ses murs, comme dans la Tour de Nesle, ont étouffé bien des sanglots ! Il faut donc apporter dans son bagage de l'énergie, du sang-froid, de la souplesse —, car il y a le Conseil municipal de Paris ! — et aussi, et surtout, une certaine dose de philosophie,d'in dulgence humaine qui vous font voir la vie comme elle est et non pas toujours comme elle doit être. Ce n'est donc pas une chose très commode de trouver un bon préfet de police, quand la place vient à vaquer et que, par surcroît, celui qui la quitte l'a occupée de façon si supé rieure. Aussi M. Barthou s'est-il donné une dizaine de jours de réflexion avant de faire ses propo sitions au Conseil des ministres. On peut croire si, pendant ce temps, les petites intrigues ont marché, et si le petit jeu des candidats à battu son plein ! Il faut éliminer, d'abord, la catégorie .bien connue des candidats qui profitent de ce qu'ils ont un ami dans un journal pour se faire met tre à toute sauce. Quel que soit le poste qui devienne vacant, vous pouvez être certain qu'il est immédiatement question pour l'occuper de M. X..^ ou de M. Y..., qui sont les messieurs Gagne de l'administration, toujours candidats et jamais élus ! Ces vieux retors ont des façons charmantes de faire parler d'eux. On en cite un qui, l'autre jour, dans l'antichambre du ministre, deman dait négligemment à un journaliste : — Avez-vous entendu dire qu'il soit question -de moi pour la préfecture de police ? Le journaliste, naturellement, mit, à tout hasard, un mot dans son journal, et c'est ainsi que naissent les candidatures et aussi qu'elles meurent. La vérité est que le choix, en. raison même...

À propos

En 1854, quatorze ans après la disparition du petit journal subversif du temps de Charles X, Hippolyte de Villemessant relance Le Figaro. Paraissant d’abord sous la forme d’une petite feuille de chou littéraire, Le Figaro absorbe L’Événement en 1866 pour devenir, sans transition, le grand quotidien conservateur que l’on connaît. Dès les années 1880, il abandonne la cause du monarchisme pour adhérer aux principes républicains.

En savoir plus
Données de classification
  • bourgeois
  • guillaume ii
  • richter
  • lépine
  • a. périvier
  • barthou
  • félix faure
  • doumer
  • sainsère
  • brisson
  • paris
  • algérie
  • berlin
  • allemagne
  • rex
  • france
  • la seine
  • commune
  • angleterre
  • londres
  • cologne
  • parlement
  • sénat
  • i. r.
  • drouot
  • union
  • eclair
  • wallès
  • parti radical
  • rhône