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Le Figaro, 14 septembre 1935

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Le Figaro
14 septembre 1935


Extrait du journal

Les journaux de Genève nous ont conté en détail la visite que le prince dé Galles avait faite à leur ville. Il est arrivé de Cannes à neuf heures et demie du matin, ayant dormi dans te train d'un paisible sommeil. Il s'est rendu à l'hôtel des Bergues, suivi de sonjpetit terrier « tout heu reux de prendre l'air » ; puis, sans prendfe contact avec aucun homme politique, il a déjeuné tout seul et, du balcon de l'hôtel, il a contemplé le Rhône, le port et le lac. (C'est une charmante estampe.) Ensuite, il a fait du shopping et étant entré chez un fameux horloger il a acheté des pen dules et des montres ; après quoi, il est allé chez le libraire où. il a acquis quelques livres ; des dictionnaires et des atlas. Enfin, l'heure étant venue, il a repris le train pour Vienne et Budapest. Je ne suis pas te prince de Galles, mais c'est exactement ce que j'aime faire à Genève le premier jour où je m'y retrouve. Le déjeuner solitaire, la promenade devant les magasins, la contemplation des montres noùvelles, tes libraires, la flânerie enfin dans cette ville pleine de reflets me paraissent tout à fait le programme d'un garçon qui tient à s'accorder une journée de liberté. Le petit ter rier, « tout heureux de prendre l'air » (comme son maître), est une compagnie que chacun n'a pas la facilité de s'accorder en voyage, mais que je comprends parfaitement. Ceci dit, venons-en à quelques considéra tions morales. L'Anglais est de tous les hommes celui qui sait le mieux être garçon, je veux dire *. bachelor » et protéger sa liberté. Le prince Galles est, de ce point de vite, exemplaire. Non point seulement parce qu'il poursuit cet état au delà d'un âge où les ri gueurs de sa charge imposent géné ralement la fin des célibats, mais aussi parce qu'il maintient avec beaucoup de naturel les privilèges de la jeunesse. S'en aller à pied dans la rue, avec son chien, acheter des montres lorsque dans la même ville vos ministres vont peut-être décider la guerre ou la paix, ne vouloir ce matin-là ne rencontrer rien autre que sa flânerie, j'estime que c'est une sagesse supérieure et qu'un Anglais possédera mieux que quiconque. Un Français de même rang n'aurait pas su protéger son incognito. On l'au rait trimbalé dans des , voitures (le prince les a refusées), des petites filles lui auraient offert des fleurs, il y aurait eu un discours, que sais-je encore. Adieu, le petit terrier, les montres, les atlas; adieu, la spon tanéité de ce matin, la nouveauté d'un jour ; adieu, la liberté, maîtresse de nos plaisirs... Guermantes. LE TEMPS PROBABLE...

À propos

En 1854, quatorze ans après la disparition du petit journal subversif du temps de Charles X, Hippolyte de Villemessant relance Le Figaro. Paraissant d’abord sous la forme d’une petite feuille de chou littéraire, Le Figaro absorbe L’Événement en 1866 pour devenir, sans transition, le grand quotidien conservateur que l’on connaît. Dès les années 1880, il abandonne la cause du monarchisme pour adhérer aux principes républicains.

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