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Le Figaro, 16 mars 1911

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Le Figaro
16 mars 1911


Extrait du journal

LES CHEMINOTS MENACENT De quoi nous menacent-ils? D'une grève nouvelle? De sabotages? De représailles politiques? On ne le sait pas encore, et la lettre qu'ils viennent d adresser à messieurs les députés ne pré cise rien. Mais elle est, cette lettre, en sa forme polie, presque doucereuse, un petit chef-d'œuvre d'impudence. Elle est écrite au nom de la « Fédéra tion des mécaniciens, chauffeurs et élec triciens des chemins de fer de France et des colonies », et rappelle que, depuis cinq mois, un certain nombre d'entre eux, révoqués pour avoir usé du «droit» de grève que concédèrent aux cheminots les législateurs, attendent leur réinté gration. C'est là. une première erreur, que si gnalait hier, ici même, notre éminent ami Jules Roche. Il y a dix-sept ans,'au cours d'un débat parlementaire, quel ques députés exprimèrent 1 avis que le droit syndical,.fondé par la loi de 1884, pouvait être étendu aux cheminots. Mais ce n'est, qu'une interprétation, cela.1 Et pour créer un droit, il ne suffit pas de l'éphémère parole de quelques législa teurs ; il faut ùn texte précis, consacré par le vote des Chambres, et qui soit une loi, ou qui complète la loi. Ce pré tendu droit dé grève des employés des chemins de fer ou, plus généralement, du personnel attaché aux services pu blics, a-t-il été, depuis vingt-six ans; ajouté à la loi — qui n'en faisait pas mention? Non. Il n'existe donc point; et la seule fai blesse des pouvoirs publics a pu laisser croire qu'il existât. Mais ceci n'est rien. Et les cheminots ne se contentent pas d'invoquer leur droit. Us s'étonnent qu'on ose les blâmer de l'usage qu'ils en ont fait. Ne se sontils pas, d'un bout à l'autre de cette grève, comportés « d'une manière sage »?. Et se peut-il qu'aucun « acte répréhensible » leur soit reproché? On les accuse d'avoir violé la discipline. N'est-il pas notoire que ce sont les Compagnies qui s^obstinent à ne point l'observer? Et la Fédération de conclure qu'il est temps que cette plaisanterie -cesse. Elle le dit sans violence. Elle insinue simple ment que les cheminots, « pionniers de la République », sauront « faire leur de voir vis-à-vis de ceux qui les abandon neront dans la situation qui leur est faite ». Elle ajoute, aimablement: «Ne le croyez-vous pas, monsieur le dé puté?». Et, pour finir : « Vous avez le droit de vouloir notre réintégration. » Encore un droit. Où le prend-on, celui-là?Et depuis quand les Compagnies dépendent-elles, dans le recrutement de leurs ouvriers, des ordres du Parlement? Pour l'honneur de ce Parlement, nous voulons espérer que nos députés feront de la lettre du citoyen Toffin ce qu'Alceste entendait faire du sonnet d'Oronte....

À propos

En 1854, quatorze ans après la disparition du petit journal subversif du temps de Charles X, Hippolyte de Villemessant relance Le Figaro. Paraissant d’abord sous la forme d’une petite feuille de chou littéraire, Le Figaro absorbe L’Événement en 1866 pour devenir, sans transition, le grand quotidien conservateur que l’on connaît. Dès les années 1880, il abandonne la cause du monarchisme pour adhérer aux principes républicains.

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