Extrait du journal

ment se créera autour de notre œuvre. Il n'y a pas de doute. Une œuvre utile, pratique, qui se démontre telle, ne peut pas être abandonnée dans un pays comme celui-ci. J'en ai non seulement la confiance, mais la certitude absolue. » D'ailleurs, continua le savant, nous nous, aiderons nous-mêmes, soyez sans crainte. Dans le vaste potager que voici, nous cultiverons nos légumes et nos fruits: les malades célibataires y travailleront une heure de temps en temps. On les payera, c'est vrai, à tant de l'heure et en jetons pour les forcera l'économie ; dans cet autre terrain, nous installerons des volières où nous élèverons des oiseaux de luxe, perdreaux, faisans, voire des rats blancs et des souris blanches. Cela se vend très bien! Nous aurons aussi des porcs, et des vaches, et des poules'. L'eau des égouts sera amenée dans des bassins d'épuration comme ceux que j'ai installés près de Lille, et pourra servir, tout épurée, mais encore chargée de principes fécondants, à l'irrigation des jardins. Quand on n'est pas riche, il faut être pratique ! » Et puis, voyez-vous, me disait le docteur Calmètte, ce système des petites maisons a l'avantage d'être extensible à l'infini. Quand nos vingt-quatre doubles villas seront remplies, et s'il nous vient assez d'argent, nous pourrons acheter le parc voisin du nôtre, qui contient 60 hec tares. Il peut venir à l'idée des grands usiniers, des compagnies de la région ou des administrations départementales (l'administration des postes, par exem ple, a 4,000 employés dans le départe ment), de fonder ici —■ 12,000 francs, ce n'est pas trop cher ! — une ou plusieurs petites maisons qui seraient réservées à leur personnel tuberculeux. » Ainsi nous pourrions nous étendre. » Pensez, ajouta-t-il, que la tuberculose figure pour 23 0/0 dans la mortalité de la France et pour 27 0/0 dans celle du Nord! N'est-ce pas effrayant? Et l'on parle de repeupler la France ! Si on arri vait-un jour à supprimer la tuberculose, la population de notre pays doublerait en vingt-cinq ans !» » Nous nous promenions à travers le grand parc tout fleuri et peuplé de chê nes superbes, de hêtres et d'ormeaux. Les toits de tuiles neuves reluisaient au soleil. Des oiseaux chantaient dans les arbres.* Mais j'imaginais aisément cette géorgique à la fois mélancolique et conso lante : dans cette nature .animée de la joie des feuilles, les lents et pâles pro meneurs, évadés des tissages et des fila tures des villes, respirant sous les arbres touffus ou bêchant leurs parterres, arro sant les fleurs vivantes, pendant que les erifànts jouaient dans les allées en criant de bonheur. OEuvre admirable, unique jusqu'à pré sent au monde, dont le plan idéal est né tout entier dans le vaste cœur sensible d'un savant, œuvre touchante et bonne, qui fructifiera. Jules Huret....