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Le Figaro, 27 février 1867

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Le Figaro
27 février 1867


Extrait du journal

J'ai voulu, comme tout le monde, voir et entendre mademoiselle Cornélie, déclamant à l'Eldorado les plus beaux morceaux de Racine et de Corneille, et je n'ai pas eu cette fois à regretter les entraînements d'une vaine curiosité. Mademoiselle Coïnélie est une véri table artiste : elle a la fougue, elle a la passion, elle a le feu sacré. Elle trouve, pour exprimer les emporte ments de la jalousie et de l'amour, une éloquence d'ac cent et de geste gui, pour n'être pas strictement con forme aux correctes traditions du Conservatoire, n'en émeut pas moins profondément les foules. C'est une tragédienne, et à ce titre, elle a droit à tous les encou ragements, car les tragédiennes deviennent rares en ce temps d'art dramatique fourbu, bu qui s'avance, bu. Quelques puritains se sont scandalisés à cette occa sion; Ils ne . peuvent supporter qu'une « prêtresse du grand art » produise son talent sur l'estrade d'un câféconcert, alterne avec des diseurs de chansonnettes e des jongleurs chinois, et débite les alexandrins majes tueux devant des buveurs de bière, dans un nuage épais de fumée de tabac. C'est prostituer la muse, disent-ils. La muse, ne leur en déplaise, n'est pas une bégueule qui doive réserver ses faveurs à quelques privilégiés : elle est le soleil de l'esprit, qui luit pour tous. Peut-être, mademoiselle Cornélie est-elle un peu de leur avis; et préférerait-elle à l'Eldorado la Comédie française ou l'Odéon. Mais, comme ni M. Edouard Thierry, ni M. de Chilîy ne l'ont engagée, elle n'a pas eu à choisir son théâtre.. Elle joue où elle peut. Et je ne sais s'il ne faut pas se réjouir, dans son intérêt comme dans "celui du public, du mauvais accueil que lui ont fait jusqu'à présent MM. les directeurs. En po pularisant la poésie des maîtres, elle se popularise elle-même. Interpréter le génie devant les multitudes, ce n'est point l'abaisser jusqu'à elles; c'est les élever jusqu'à lui....

À propos

En 1854, quatorze ans après la disparition du petit journal subversif du temps de Charles X, Hippolyte de Villemessant relance Le Figaro. Paraissant d’abord sous la forme d’une petite feuille de chou littéraire, Le Figaro absorbe L’Événement en 1866 pour devenir, sans transition, le grand quotidien conservateur que l’on connaît. Dès les années 1880, il abandonne la cause du monarchisme pour adhérer aux principes républicains.

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