Extrait du journal

Je suis peintre, mademoiselle, et je crois réunir , a un haut degré lés qualités que vous exigez de celui auquel vous don nerez un jour et votre cœur et votre main. Je n ai aucune for tune, et je bénis l'injustice sort puisque je lui devrai pèut-ètremon bonheur-. • Mon beau talent ne me donne point le pain de chaque joffr, et je crains bien qu'il ne me le donne jamais. C'est une des hontes d'un siècle qui s'abreuve à longs traits à la coupe du Thérésaïsme de laisser les aigles se morfondre sur les cimes pour les forcer à descendre dans les vallées afin de se souiller au contact des êtres gras et prosaïques. Non 1 blanches Alpes, non ! neiges immaculées des pics vierges, je vous garde ma foi, je resterai dans ma solitude étoilée. Fiers sont vos sommets dans leur beauté tranquille et fier aussi mon cœur ! Ma modestie est égale à l'élévation de mes idées et je n'ose pas m'appesantir sur les charmes que quelques natures d'élite qui m'entourent, et que je me ferai un vrai plaisir de vous pré senter, s'accordent à reconnaître en moi; mais je crois être ce qu'on appelle une belle âme. Je n'ai point donné mon cœur en pâture à ces femmes échevelées qui vendent le doux nom d'amour. Vierge encore, ce cœur qui s'ignore attend l'artiste inspiré qui va le faire vibrer. C'est un Amati, que dis-je? un Stradivarius sur le dos duquel quelques folles créatures se sont obs.tineés à frotter leur archet ; vienne La Joachim ins pirée, elle saisira l'instrument, et d'une main à la fois délicate et nerveuse en saura tirer, j'en suis sûr, les plus suaves ac cords....