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Le Fin de siècle, 26 août 1891

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Le Fin de siècle
26 août 1891


Extrait du journal

A mon ami Antony Pichery, — C’est bien, c’est bien, Je vais aller trouver maman ; nous irons chez l’avoué. Nous demanderons le divorce. Oui, mon sieur — vous pouvez rire, comme une huître, ça ne me touche pas, des insultes semblables — oui, lo divorce ! Et la pauvre petite femme, épuisée par cet accès de fougueuse colère, s'enferma dans sa chambre, dont brusquement elle forma la porte au nez de son indigne mari, et se mit à pleurer, comme la plus désolée des Marie-Magdeleine. Encore en chemise — une fine chemise très décolletée — elle alla se jeter sur son lit, sanglotant toujours. Et loin de s’apaiser, après le départ du misérable qui avait provoqué ce drame matinal, à huit heures du matin, la mignonne jura qu’elle saurait bien se venger et que sa vengeance serait terrible. Car jamais, non jamais, pauvre petite femme n’avait ou à subir plus violent outrage. Du reste, vous allez en juger : après une nuit charmante, émaillée do caresses bien douces, de baisers bien tendres, à l’aube, madame avait été prise d’une rage atroce de dents. Et tandis qu’elle se convulsait, Eugène, au lieu de courir chez les pharmaciens, de leur réclamer des élixirs, des calmants, s’était pesamment assoupi. Comme une brute, sans oreilles et sans cœur, il avait dormi. Puis — cir constance aggravante — à l’heure du ré veil, au lieu de chercher à so justifier, il avait déclaré d’un ton maussade : — Après tout, j’ai besoin de sommeil, moi qui m’enferme dans un bureau, cha que jour, de huit heures du matin à six heures du soir. Ah ! cette réponse le peignait bien, cet être égoïste. Lui, rien que lui, toujours lui. Boire, manger, dormir. Cei endant, il fallait bien en convenir, il avait, à cer taines heures, quelques attentions pour sa femme. Beaucoup u‘attentions même. Depuis six mois qu’ils étaient mariés, pas une fuis, non pas une, il n’avait omis de remplir ses devoirs conjugaux. Il s’ac quittait avec beaucoup do complaisances et de gentillesses de la charmante beso gne quotidienne. Ce n’était pas un de ces maris ponctuels qui ne font que stricte ment leur service et rien de plus. Non, Eugène prolongeait avec adresse la petite bavette, causait longtemps, jasait, et ja mais encore on n’eut pu lui faire ce re proche i Tu restes en panne au plus chouette ! 11 terminait tous ses contes, tous ses récits par ces pointes, ces subtilités qui prolongent l’intérêt et l’excitent jusqu’au dénouement. Et quand une histoire était finie, il en recommençait une autre......

À propos

Fondé fin 1890 par François Mainguy et René Émery, Le Fin de siècle était un journal mondain bihebdomadaire. Lorsqu’il paraît, il sort immédiatement de la masse en vertu de son style badin et de l’érotisme à peine voilé de ses dessins. En 1893, son « bal Fin de siècle » fait scandale à cause de la tenue très légère de certaines de ses convives. Quelques années plus tard, en 1909, le journal devient Le Nouveau Siècle. Il disparaît en 1910.

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Données de classification
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