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Le Fin de siècle, 26 novembre 1896

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Le Fin de siècle
26 novembre 1896


Extrait du journal

un discours comme il s’en fait aux Chambres que la pauvre enfant était obligée de donner ou de refuser ce difficile consentement. L’épreuve eût été vraiment trop dure. Une pantomime bien simple la dispensait de par ler. Tirait-elle l’étui de sa poche et le posait-elle sur son assiette ? cela voulait dire oui. Mais, au contraire, en extrayait-elle une poignée de noix et la mettait-elle devant elle? cela équivalait à un non officiel. Seu lement, gare au futur qui s’attirait cette démonstration, en apparence innocente, une nuée de quolibets, d’un goût douteux, l’ac cueillait et le poursuivait jusque chez lui. 111 Jeanne et Justin s’aimaient. C’était leur droit et je vous pHins si vous n’usez du vôtre. Jeanne avait l’admirable type des Landaises du Sud-Ouest, lesquelles tiennent à la fois de Rome et de Séville, Latines par la régularité des traits, Espagnoles par les beaux tons d’ambre de la peau, de taille moyenne, mais d’un dessin pareil à celui des plus superbes bronzes antiques, d’une allure si fière qu’elles font penser à l'tncessu pal ni t Dca du poète. Leurs cheveux sont bleus à force d’ètre noirs ; leurs yeux constellés comme des nuits d’août ; leurs pieds et leurs mains sont un poème en quatre chants où sont célébrées la beauté de la race et la pureté du sang. Justin était le digne mâle de cette délicieuse femelle, un beau gars, bien planté, bien musclé, léger comme un chamois et fort comme un bœuf, habile à tous les jeux où se démontrent la vigueur et l’adresse. Son seul défaut était une certaine fatuité et un goût prononcé pour la vantardise. Il avait eu beaucoup de maîtresses et avait encore le grand tort d’en être fier. Car je sais bien des imbéciles qui n’en ont pas en moins que lui. Jeanne savait son passé galant, mais elle n’en était que plus glorieuse de s’at tacher, par les nœuds indissolubles du ma riage un homme qui ferait tant de jalouses en l’épousant ! Vous voyez qu’elle était, au fond, presque aussi bête que lui. Mais join dre à la beauté de Vénus ou à celle de Mars, suivant le sexe et le cas, le bon sens de Mi nerve ou de Sarcey n’est donné qu’à fort peu de gens. Et c’est Dieu merci 1 car des êtres par faits seraient parfaitement insupportables. C’est ce qui m’empêche de me montrer tel que je suis et me contraint à mille fraudes indignes d’un galant homme, pour dissimu ler à mes semblables l’excès de mes beautés et de mes vertus. Ce que j’ai fait pour délormer mon nez grec et en faire l’anse de poê lon que vous voyez est prodigieux. Mais il s’agit bien de moi dans cette histoire ! Reve nons donc à nos amoureux....

À propos

Fondé fin 1890 par François Mainguy et René Émery, Le Fin de siècle était un journal mondain bihebdomadaire. Lorsqu’il paraît, il sort immédiatement de la masse en vertu de son style badin et de l’érotisme à peine voilé de ses dessins. En 1893, son « bal Fin de siècle » fait scandale à cause de la tenue très légère de certaines de ses convives. Quelques années plus tard, en 1909, le journal devient Le Nouveau Siècle. Il disparaît en 1910.

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