Extrait du journal
Comme samedi, la grande préoccupa tion est de savoir si M. Thiers parlera ou non. La question reste douteuse, même pour les « mieux informés », mais ce qui n’est douteux pour personne, c’est l'effort que va tenter la gauche afin de rompre l’accord établi entre le gouvernement et la majorité. Le coup porté l’avant-veille par les 499 voix a frappé, frappé si loin et si fort qu’il n’y a plus de ménagements à garder. « Coûte que coûte, il faut forcer » le gouvernement à s’expliquer », dit-on dans les couloirs de gauche, et les échos répètent au loin de bruyants défis. * * # La séance s’ouvre, et M. Jean Brunet monte à la tribune. Serait-ce pour opposer quelque contre-projet à l’œuvre de la com mission,une nouvelle élucubration politique, fruit de ses solitaires méditatioas ? Non, M. Jean Brunet se plaint simplement d’ê tre victime, depuis l’époque où il vote avec la majorité, d'une sorte de mystification qui consiste à le faire voter en même temps pour et contre. Le fait s’est encore pro duit lors du scrutin de l’avant-veille, mais M. Jean Brunet, instruit par 1 expérience, avait pris ses précautions : le bulletin blanc, le vrai, le conservateur, celui que lui-même, de sa main, a mis dans l’urne, il l'avait marqué en y écrivant au crayon son prénom ; l’autre bulletin, le bleu, le mystificateur trouvé également dans l’ur ne, ne porte aucune marque. Il y a donc un coupable, coupable inconnu, que M. Jean Brunet menace de toutes les rigueurs, si par malheur le fait se renouvelait. * * « Le procès-verbal est adopté et le débat s’ouvre sur le préambule du projet de la commission des Trente. Grâce à ce préam bule, forcément « général » en sa qualité de préambule, la gauche entend reprendre la discussion «générale» dont l’issue lui a été si fatale à la dernière séance. En effet, M, Le Royer apparaît à la tribune, * * * La gauche, en tant que parti parlemen taire, fait preuve souvent d’une discipline, d’une cohésion et même parfois d’un tact politique qu’il serait puéril de mé connaître et que, plus d’une fois, on serait tenté de recommander aux méditations de la droite. Rarement l’on a vu la gauche se laisser entraîner au combat par un de ces enfants perdus, un de ces fantaisistes audacieux comme il s’en trouve dans tous les partis, et quand il arrive un de ces jours de grande bataille prévus à l’a vance, à la façon dont ses orateurs se suc cèdent et sont*soutenus,il estaisé dedeviner que rien n’a été laissé au hasard, qu’il y a eu un plan discuté et convenu d’avance, d’après lequel chacun a reçu son rqle au quel il est tenu de se conformer. Si donc M. Le Royer paraît à la tribune, ce n’est pas seulement parce qu’il a envie de pro noncer un discours, M.Le Royer prend la parole parce qu’il a été choisi à cet effet, ses amis politiques le jugeant plus apte que tel ou tel autre à ouvrir le feu dans les circonstances présentes. * * # Ce n’est pas que M. Le Royer soit un grand orateur. Loin de là ! L’honorable député du Rhône n’a ni le génie de la vraie éloquence, ni la passion du tribun. Le fond de ce qu’il dit est banal, connu, médiocre, et la forme n’a ni originalité ni élégance. Le débit est ordinaire, les gestes assez vulgaires. Mais M. Le Royer a une grande qualité aux yeux de ses amis de gauche, qualité précieuse à l'heure présente : il a l’air sérieux. M. I,e Royer est un républicain bourgeois et grave. En tant que bourgeois, on peut être sûr qu’il récitera « sur le mode vom lu » tous les lieux-communs oui depuis quatre-vingts ans se répètent, {Comme au tant dixièmes, dans tous les cafés de France, contre les conservateurs en géné ral et les monarchistes en particulier. En tant qu’homme sérieux, en n’a pas à redou ter de sa part la moindre fureur démagoCrimiû la mzxîn/4 ra onoonf inen...
À propos
Lancé en 1868, Le Français était un quotidien à la fois catholique et libéral. Tirant à seulement 4 000 exemplaires, son lectorat est toutefois toujours resté très limité. Absorbé par Le Moniteur universel en 1887, le directeur du Français publie néanmoins quelques numéros en indépendant jusqu'en 1898, afin de conserver la propriété du titre.
En savoir plus Données de classification - thiers
- dufaure
- bertauld
- jean brunet
- baragnon
- gambetta
- duvergier de hauranne
- wells
- leblond
- grévy
- royer
- londres
- france
- aix
- paris
- bilbao
- rhône
- espagne
- toulouse
- auch
- l'assemblée
- la république
- agence havas
- m. i
- parti conservateur
- chambre des communes
- république française
- union
- parlement