Extrait du journal

Z’Zdole aux sanglants stigmates. L'Envoûté de la peur. Un petit rouquin aux yeux clignotants, tels des yeux de bête nocturne. Laid comme un moujik avorté, qu'aurait procréé l'ivresse d'un grand-duc. Fils et petit-fils d'alcooliques, il hérita de toutes les dégénérescences- Hystérique, on raconte qu'il tombe du haut mal. Sa jeunesse grandit sur et entre les genoux de la danseuse Krzcesinskaia. tandis que son -hère et sa mère faisaient tourner les tables, il pratiquait astrologie et s'onanisait en contemplant la lune. Obtus et ignorant à l'égal d'un valet de pife. Se vante, avec Pierre Loti, de n'ouvrir jamais un livre. Esclave de sa névrose, tantôt il vagit comme un enfonçons, tantôt hurle comme un concussionnaire. La Conférence de La Haye, dont le louèrent nos agenouillés, fut convoquée par sa frousse impériale. « Si tu veux la paix, prépare le massacre. » Il s’assura contre l'âpreté de ses loches, conviant à la danse des roubles les grand-ducs toujours ivres, qui polluent de vomissures la route de Paris à Monaco. Humble devant un de Plehve, il tint placidement la comptabilité des tueries de Kichinev. Sa cruauté maladive revêt avec coquetterie la mansuétude orthodoxe. Il dit « mes enfants » aux prolétaires qu'il fusille, du ton de T hivers susurrant « mes amis » aux Parisiens canardés. Et lui aussi est le « petit père », le tueur frénétique et paternel, le bon papa qui sourit d'une large gueule sanguinolente. I.'adorable paternité! Lorsqu'un tsar couvre sa femme, humanité s'en épouvante. C'est la peste coïtant avec le choléra. Un vêtement de tsarine équivaut-il pas à un désastre cosmique ! A quoi songe-t-il, seul à seul, cet aztèque du Nord ! En proie aux tortures d?une « boxbite » latente, ce patient étudie-t-il la chimie, comme un diabétique étudie le foie, et un dysseptique estomac ? Donne-t-il audience aux fantômes dont son angoisse peuple le Palaisd,'Hiver ! On dit qu’il ne dort plus et que sa hessoise épouse, qu'on représente droite et rigide en scs atours archaïques, pareille à une courtisane byzantine, est, à vrai dire, hantée par la tête sectionnée de P Autrichienne- Quelles scènes pour un Shakespeare-' Et, si quelque chose pouvait rassasier la haine populaire, ne serait-ce pas le spectacle de ce couple suant la peur et claquant des dents, terré au fond d'un palais clos où demain, peut-être, la Hyène et sa Femelle fuiront éperdument devant le Bon Chasseur ?...