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Le Globe, 6 novembre 1885

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Le Globe
6 novembre 1885


Extrait du journal

consommation et de maintenir ses béné fices avec une quantité d'alcool moindre que par le passé ; de cette façon, tout en payant un tiers de plus par hectolitre au fisc peur éviter les ennuis intolérables de l’exercice, il ne déboursera en somme pas de plus fortes avances qu’aujourd’hui. Dès à présent ecs avances qui vont en moyenne à 200 fr. par hectolitre, sont très lourdes et exigent de sa part un capital très considérable et très coûteux : la plu part des maisons, et même des meilleures, ne sauraient sans peine, en ce moment surtout, augmenter encore le chiffre de ce capital. La falsification leur épargnera cette extrémité. En résumé, on aura donc abouti à ren dre pires encore les liqueurs alcooliques, principalement celles qui se consomment au détail, et cela sans accroître les recettes du Trésor. L’alcoolisme seul prospérera de plus en plus : car on sait bien que ses pires vic times ne sont pas les gens qui boivent le plus d’alcools, mais ceux qui boivent les alcools les plus falsifiés. Ajoutez que tout accroissement d'im pôts, qu’il porte sur les boissons ou ail leurs, tend à accroître la misère, à dimi nuer la consommation de la viande et du vin, et en général des aliments hygié niques. Or, quand l’ouvrier se nourrit moins bien, d se rattrape sur l’eau-devie : c'est une sorte de loi fatale, qui a été démontrée à l’évidence par une enquête du gouvernement fédéral en Suisse : notre collaborateur, M. Yves Guyot, en a résumé ici les résultats désolants. Ainsi, de toute façon, en marchant dans la voie de l’ac croissement des impôts, le ministère a toutes chances de développer l’alcoolisme en France. Mais, s'il s’attaque aux impôts sur l’alcool, il obtiendra en outre ce second résultat, d’avoir frappé lecontribeuble sans enrichir le budget. C’est le pendant du pro jet de Labiche dans le Panache, mais ce n’est pas aussi gai. En vérité, nous serions surpris que des élus d’hier, des gens qui viennent de par courir nos villes et nos campagnes, et qui ont dû écouter les doléances des électeurs, songent à fortifier la République en créant même un seul impôt nouveau. Le véritable grief qu’on a contre la Ré publique, c’est, au fond, que les affaires ne vont plus bien, et que les charges pu bliques semblent plus lourdes. L’affaire du Tonkin, qu’on a pu exploiter tint fois con tre le gouvernement, est une arme qui ne servirait pas deux fois : partout où les ré publicains ont voulu se donner la peine de combattre les calomnies des monarchistes, de relever le moral du paysan en lui rap pelant que la sécurité de la France est fondée sur son prestige, etqu’on n’évite pas les grandes guerres à moins d’avoir su faire à temps celles qui sont, petites, ils ont ré veillé aisément le bon sens qui est au fond de toutes les cervelles de paysan, et le sang gaulois qui coule dans toutes les veines françaises. Les plaintes du clergé ne se laisseront pas aussi facilement calmer ni réduire à l’impuissance ; mais qu’on y songe bien : c’est la misère qui fait la force des cléri caux ; dans les villes, c’est auprès des mi sérables qu’ils vont porter et leurs secours et leurs insinuations ; dans les campagnes, c'est après les mauvaises récoltes ou les récoltes mal vendues (pic les menaces de M. le curé sont écoutées ; c’est alors qu’on croit volontiers, sur sa parole, (pic Dieu est niché et sc venge de voir les sémina ristes aller à la caserne. Rendez au paysan sa prospérité, à l’ouvrier un travail bien payé, et vous aurez restitué à l’un son in dépendance d’honneur, à l’autre sa verve voltairienne. Si donc vous voulez que la République soit forte, ne travaillez pas à rendre la vie matérielle plus difficile, ne créez pas de charges nouvelles au peuple. Oh ! nous le reconnaissons, la politique des économies est plus difficile à suivre que la politique d’accroissement des im pôts. Rien de facile, au premier abord, comme de décréter une surtaxe. Il faut...

À propos

Fondé par Adolphe Coste en 1871, Le Globe était un journal républicain qui se donnait pour mission d’« instruire son lectorat », et de lui apprendre à tirer le meilleur de la nouvelle situation politique en France après l’Empire – souvent d’un point de vue économique. Ce journal ouvertement cynique sera publié jusqu'en 1938.

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