Extrait du journal
citoyens d’une espèce particulière et des citoyens privilégiés, car ils ne participent pas aux charges qui pèsent sur les Français. On comprend sans peine, en présence d’une situation aussi inexplicable, que de très bons esprits aient songé à leur imposer des obligations pécuniaires. Depuis deux ans, de nombreux projets | de loi ont été émis dans ce sens. Les ! plus modestes ont réclamé le rétablisse ment des permis de séjour, renouvelable^ | tous les six mois avec un droit de timbre de 20 à 15 fr. D’autres ont voulu un impôt direct, une sorte de capitation, et enlin, dernièrement, plusieurs députés ont déposé une proposition de lui frappant d’un droit direct et assez élevé les patrons français qui emploient des ouvriers étran- i gers. Ce dernier projet a été très favora blement accueilli par l’opinion publique ; i nous croyons qu’il devra réunir à la j Chambre une majorité. Quant à la question des étrangers ; proprement dite, elle se lie intimement i à celle de la nationalité et elle a déjà | reçu un commencement de solution par le projet que le Sénat a dernièrement ! voté. .Nous croyons que dans l’espèce il ; faut se garder de céder à des préoccupa- ; lions locales; il faut avoir en vue l'avenir ; de la nation. Et qu’on ne s’y trompe | pas, l’avenir de la France n’exige pas des lois de proscription, des lois draco niennes qui nous feraient revenir aux plus mauvais jours de l’ancien régime. A-t-on quelquefois rélléchi au trouble que pourrait causer dans les masses populaires l’expulsion ou la mise hors la loi de certains patrons qui, quoique étrangers, le fait n’est pas rare, emploient de nombreux ouvriers français ? Qu’on ne s’y trompe pas, l’étranger n’est pas l’ennemi. 11 y a place dans notre démocratie pour tous les hommes de bonne volonté, quelle que soit leur nationalité. 11 n’en est pas moins vrai, et nous sommes les premiers à lereconnaitre, qu’il faut leur imposer des charges égales, sinon supérieures, à celles qui pèsent sur les fiançais. Là est la vraie justice ; que toutes les préférences de l'Etat comme des départements soient pour les ouvriers et les entrepreneurs français, il serait malaisé qu’il en fût autrement. Mais qu’on se garde de porter atteinte à la prospérité de la France pour donner satisfaction à des intérêts qui se concilient mal avec l’intérêt national. Sans doute, quand cette question sera portée devant les Chambres, elle sera l’objet de plus d’une discussion inté ressante. On parlera de ces étrangers dénationalisés si peu dignes en effet d’intérêt, de ces jeunes gens qui pour se soustraire aux obligations militaires, ne craignent pas de rester toute leur vie sans patrie ? On dira que cet exemple est funeste dans nos départements frontières et nous ne le contredisons pas. Mais qui donc empêche de leur rendre plus facile l’acquisition de la nationalité française, de la leur imposer même quand ils réunissent certaines conditions ? Du même coup , on fera cesser cette situation anormale et on augmentera, dans une assez large mesure, la population de la j France. Il sera bon toutefois de ne point i confondre le patriotisme et le cosmopo- j liticisme. Frontière veut dire Patrie, j disait M. Batbie dans un de ses derniers discours au Sénat. Il y a un modus j vivendi à chercher et à trouver et nous | croyons qu’on peut le faire en étant tout j à la fois plus hardi que la Chambre haute | et tout aussi patriote. C’est à cela que devront tendre nos ! législateurs. 11 est nécessaire que cette loi i soit promulguée avant la lin de la légis- i lalure. Nous le répétons, en faisant une j bonne loi sur la nationalité, en y ajoutant au besoin quelques dispositions spéciales j pour les étrangers résidant en France, la i...
À propos
Fondé en 1869, Le Guetteur de Saint-Quentin et de l’Aisne affiche très vite son indépendance totale vis-à-vis de l’État en tenant haut le drapeau de la démocratie. Profondément pacifiste, le journal est convaincu que l’entente des peuples doit passer par une démilitarisation multilatérale. Il paraît jusqu’en 1914.
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