Extrait du journal

Le fait scandaleux qui s’est pro duit dimanche soir en gare de Saint - Quentin, appelle quelques commentaires. Il nous parait d’au tant plus nécessaire d'y revenir que l’autorité administrative, si nous sommes bien renseigné, chercherait sinon à étouffer l'affaire tout ail moins à atténuer la responsabilité des policiers coupables. Il faut d’abord reconnaître que M. Clemenceau a obéi à une singu lière idée le jour où il a résolu de créer une police mobile, comme si celle que nous avions ne suffisait pas. La plupart des journaux ont approuvé la nouvelle organisation sans réfléchir qu'on nous ramenait aux beaux jours de l’Empire auto ritaire où chaque bourgade avait un ou plusieurs commissaires de police. Ils ont crû naïvement que la nou velle police allait mettre la main sur tous les malfaiteurs dont le nombre, il faut le reconnaître, parait s’ac croître chaque jour. Nous ne l avons jamais cru pour notre part et nous avons dit déjà ce que nous pensions de cette nouvelle organisation policière. Plus de crimes impunis, plus d'affaires criminelles classées faute d’en découvrir les au teurs était évidemment un beau rêve. Combien il faut en rabattre. Sans doute, depuis la création de la police mobile, un certain nombre de malfaiteurs ont été mis en état d’ar restation, rien ne prouve cependant que ces arrestations n’eussent pas été opérées avec le seul concours de la gendarmerie et de la police ordinaire. Autrefois, la gendarmerie concou rait par une très large part à la ré pression des délits et des crimes. Avec les lois militaires nouvelles imposées pour la défense du terri toire, les gendarmes furent peu à peu placés sous la dépendance de l’autorité militaire qui les utilisait pour tous les services relatifs aux appels et à la mobilisation. Ces temps derniers, on les a déchargés d’une grande partie de cette besogne confiée maintenant à l’administra tion des postes. La gendarmerie redevient donc, comme elle l’était autrefois, une précieuse et indispen sable auxiliaire de la justice. Il était donc, à notre sens, inu tile de créer une police mobile dont le fonctionnement, après tout, coûte assez cher à l’Etat, partant aux con tribuables. Seulement, ce nouveau service a permis de caser un certain nombre de protégés qui passent leur temps le plus agréablement du monde, puisqu’il consiste à se pro mener et à se « prélasser » dans les compartiments de Ire classe qu’on ne savait pas réservés à de bas policiers. Si la police se bornait à son rôle qui est de dresser des contraven...