Extrait du journal

11 y a de longues semaines que je voulais parler de ce livre. Mai» il est né dans une tourmente et la tourmente l’a emporté. Elle le ramène aujourd'hui et impose à nos esprits. Si, eu effet, on retrouve dans La Croyante « l’atmosphère morale de l’Affaire », on retrouve aussi dans l’Affaire toute La Croyante. Ce pour quoi Clotilde Eyli apparaît très haute et très belle, n'estce point ce pour quoi amis, indifférents, adversaires, tous ont salué, avec un respect attendri, Mme Lucie Dreyfus apportant à l’homme qu’elle a élu, le témoignage, le secours, le réconfort de son indéfectible foi? Cinq années d’angoisse ne l’ont ébranlée, ni troublée. Ni la sentence rendue dans la nuit en 1894, ni plus tard la coalition de toutes les forces organisées du pays, ni les manifestations de la foule et les conflits dans la rue n’ont inquiété celle âme. Elle a souffert sans désespérer jamais. Telle Clotilde donnant à son frère bien-aimé le tragique conseil de partir, malgré les embûches tendues à son jeune courage, elle a nié qu’il fut un autre péril au monde que le mensonge, et s’est attaché à la Vérité d'une prise si forte que les plus redoutables puissances s’humilient aujourd’hui devant son triomphe....