Extrait du journal

Avez-vous remarqué? Les médecins sont, le plus souvent, d'un caractère jovial; en revanche, les pharmaciens sont moroses. Ils souffrent, dirait-on, d'une sorte de neurasthénie professionnelle. L'un d'eux m'a fait ces confidences : - Croyez-vous que l'existence que nous menons soit bien drôle? Notre horizon est borné par une muraille de bocaux. Nous avons étudié pendant de longues années pour mener, finalement, une banale existence de petit commerçant. Nos bénéfices sont légers, mais nos responsabilités sont lourdes. Et notre récompense, c'est l'ironie avec laquelle on nous traite depuis que votre Flaubert a cru devoir choisir 1.1., pharmacien pour incarner la prétention et la bêtise des demi-savants. Croyez, monsieur, que c'est là une criante injustice, car notre mo destie est grande, bien plus grande que celle d'un tas de médecins dont nous réparons fort heureusement les erreurs en dosant les potions à la fois dangereuses et grotesques avec lesquelles ils prétendent vous guérir d: la grippe ou du béri-béri....