Extrait du journal
Je ne sais pourquoi mon souvenir me ramène, avec un plaisir si constant, vers ce coin de paysage, que je vous ai décrit peut-être déjà, où, jusqu'à quinze ans, je passais mes vacances quand je n'allais pas à Toulouse, avec sa maison rectangulaire que Mme de Genlis avait habitée, longtemps avant que ma tante Paule, vieille elle-même, l'achetât avec son parc demi-seigneurial, dont un petitfils de Le Nôtre avait dessiné les charmilles, et son panorama aimable que le cours de la Seine coupait en deux, parallèle aux allées du grand jardin, s'épanouissant sur l'autre bord du fleuve, aux tilleuls, rosés à l'automne, de Soisy-sousEtioles, bordé à droite par la vue des faubourgs de Corbeil, à gauche par les magnifiques ombrages de Champrosay, où l'hospitalité d'Alphonse Daudet me rendit quelquefois les impressions d'antan vagues dans l'air que j'y respirais, à Grand-Bourg, entre Ris-Orangis, aux villas pimpantes, et Evry, plus mélancolique. Mais je ne crois pas vous avoir parlé de la source qui s'y cachait dans le coin le plus touffu de la propriété, non loin d'un pavillon ridicule aux vitres multicolores, et dont l'eau était si délicieuse et parfaitement limpide que les voisins demandaient la permission d'y venir puiser quelquefois, par les grandes chaleurs de 1 été, une source très creuse, avec un fond de plantes aquatiques étincelantes comme des émeraudes fluides et qui tressaillaient sans cesse sur un sable d'or, bordée, comme de longs cils, par des roseaux ronds et minces qui montaient de la terre humide avec des tons orangés, se teintant seulement de vert à la cime ; une source si vivante, dans sa transparence, formant si bien, dans le gazon sombre, un trou de lumière où descendait, par une déchirure des feuillages, la clarté bleue du ciel que, plus qu'aucune autre source, elle donnait l'impression d'un regard, car, vous l'avez remarqué comme moi ;...
À propos
Fondé en septembre 1892 par Fernand Xau, le quotidien Le Journal fut l’un des titres de presse les plus importants au début du XXe siècle. Modéré, parfois frileux, il séduit une large audience populaire par son contenu littéraire de qualité et la collaboration de grandes signatures. D’une sensibilité républicaine à ses débuts, il s’en détache peu à peu pour adopter une ligne davantage nationaliste et anticommuniste – assurément de droite – sans jamais côtoyer les extrêmes.
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