Extrait du journal

Certes, l'imitation systématique, l'adoption intégrale des idées et des mœurs européennes, le souci du « qu'en odira-t-on ? » qui est extrême chez les Japonais, et, par surcroît, les récriminations incessantes des pasteurs, ces rabat-joie bien intentionnés, ont déjà diminué le charme des îles nippones. Encore une génération peut-être, et le Japon sera, il faut le craindre, devenu aussi maussade que les plus maussades des pays d'Europe. Mais, pour l'instant, il conserve encore de beaux restes de ses anciennes séductions ; les sourires qu'il adresse aux voyageurs ont conservé un charme ensorceleur ; les fleurs qu'il nous montre restent vraiment différentes de celles qu'on peut cueillir aux banales plates-bandes du Luxembourg, de Versailles ou des kew gardens. Heures précieuses, heures délicieuses celles DÙ nous voyons un peuple dont la constitution mentale, les idées fondamentales, les mœurs étaient encore, il y a trente-sept ans, en partie celles de l'antiquité grecque, et en partie celles de la féodalité européenne, faire un bond inouï hors de soi-même et se ruer en plein vingtième siècle. Se ruer ? Mais non point tête baissée, non point à l'étourdie ; au contrairev avec une sagesse,, un discernement, une - prudence digne des héros d'Homère qui, comme vous savez, ne faisaient point seulement assaut de courage, mais aussi de sagacité....