Extrait du journal

— J'arrivai à Welligemma, un matin, dans une carriole attelée de deux poneys de Birmanie achetés par moi, à Pointe de Galles. La nuit avait été fraîche et parfumée; je me trouvais dans des dispositions conciliantes. Je fus vraiment enchanté du spectacle, qui, presque tout d'un coup, au sortir des ténèbres de la nuit tropicale, s'offrit à moi. Les Cynghalais, sous l'auvent de leurs maisons de bambous, dormaient encore, roulés dans des châles de laine blanche. Partout des fleurs ; de grands lys rouges, de grands lys roses, ouvrant leurs coupes odorantes aux rebords dentelés; des caludiums, étalant leurs feuilles polychromes, filigranées d'or brun, frottées d'or vert ; des broméliacées, gonflant, entre leurs feuillages gladiolés, d'énormes spathes, en forme de phallus. Et les légumineuses grimpantes, les mauves volubiles rejoignaient les grands arbres, en molles et hautes guirlandes. Les passiflores, au-dessus des fougères arborescentes, couraient, en arcades ajourées, en nefs sveltes, en ogives aériennes, en rosaces tremblantes ,évoquant des architectures de rêve, d'indicibles mosquées, de légères cathédrales qui vibraient doucement, dans la joie, si musicalement pure du matin. --...