Extrait du journal
Après les orateurs officiels, M. Alexandre Hepp a bien parlé de Charles Floquet, l'autre matin. Ses Quotidiennes sont comme des médaillons achevés qu'on accroche, en manière de frises, aux rayons de la bibliothèque. Floquet méritait, après le monument du Comité, ce profil signé d'une main amie. C'était un loyal et bon citoyen, éloquent, généreux, confiant et sans haine, un idéaliste qui jugeait les hommes d'après lui-même et qui, incapable d'une cruauté dans la bataille, fut tout étonné et plus attristé encore — non pour sa propre personnalité mais pour ses contemporains euxmêmes — du déchaînement de rancunes et de calomnies qui l'assaillirent un jour.«Toute loi, disait Chamfort,-qlli, à l'inverse de Floquet, ne pécha point par excès d'idéalismc - toute loi sera inutile contre la calomnie, parce que la calomnie ne coûte p-as cheret qu'elle se vend bien.» Cependant, voilà que les uns après les autres, les grands calomniés ont leur statue. Jules Ferry, qui connut mieux que pas un homme de ce temps cette forme spéciale de la gloire qu'on appelle l'impopularité, a son image dressée sur cette terre de Tunisie qu'il a donnée à la France et les voix amies, qui sont ici la voix de l'histoire, ont, en ce cimetière du Père-Lachaise, reverdi par le printemps, rendu justice au tribun qui attira sur lui tant de colères en combattant le boulangisme. Je dois dire que, s'il devait connaître les amertumes de ces fins de vie qui sont toutes lugubres, assure Biaise Pascal, Charles Floquet avait eu une journée d'acclamations et de triomphe le jour où, place du Carrousel, on inaugurait le monument de Gambetta. Ce matin même, il venait, au fond d'un jardin deNeuilly, de se battre avec le prétendant d'alors et l'avocat, plus habile aux parades de la tribune qu'à celles du terrain, avait cependant enfoncé son épée dans la gorge du général Boulanger. Et la foule, l'éternelle foule, toujours prête à acclamer les vainqueurs, fit une ovation à Floquet lorsqu'il apparut dans le groupe des orateurs officiels. « Ecoutez leurs cris d'enthousiasme et voyez tout ce monde », disait un courtisan à Bonaparte. Le premier consul répondit : « Il y aurait autant de monde, mon cher, pour me voir conduire à l'échafaud ! »...
À propos
Fondé en septembre 1892 par Fernand Xau, le quotidien Le Journal fut l’un des titres de presse les plus importants au début du XXe siècle. Modéré, parfois frileux, il séduit une large audience populaire par son contenu littéraire de qualité et la collaboration de grandes signatures. D’une sensibilité républicaine à ses débuts, il s’en détache peu à peu pour adopter une ligne davantage nationaliste et anticommuniste – assurément de droite – sans jamais côtoyer les extrêmes.
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