Extrait du journal

Elle gardait encore la collection des poupées de son enfance ; elle conservait les goûts, les habitudes, les distractions, les plaisirs, - les attendrissements qui avaient été ceux de sa jeunesse et de son âge mûr. On voyait se succéder, autour d'elle, les Parlements, les ministres, les hommes d'Etat, les membres de plus en plus jeunes de sa propre famille. Elle continuait sa vie ponctuelle, partagée entre les mêmes devoirs officiels et les mêmes repos réguliers, se renouvelant à des dates fixes dans les mêmes résidences où elle se rendait annuellement, selon l'ordre des saisons. Son régime était devenu comme le chronomètre des devoirs princiers et sociaux en Angleterre et un peu en Europe. Autour d'elle, les deuils s'accumulaient, selon la forte parole de Tacite que « l'on vieillit en noir », Nigrâ in veste senescunt. Mais les voiles de crêpe qui s'épaississaient sur son corps diminué et courbé n'accablaient pas sa robuste vieillesse. L'Angleterre et le monde s'étaient habitués a sa personne, à sa figure et à son nom, si'bien qu'on se demandé comment ils vont faire, maintenant, pour s'en déshabituer....