Extrait du journal

Dans le petit village alsacien, les poi lus vont et viennent en devisant, inter rompus souvent par la sonnerie brève du «Carde à vous» qui oblige tout le monde à s'abriter sous les larges auvents des maisons multicolores : ce sont des avions ennemis qui circulent curieux el que notre artillerie salue bruyamment. Comme c'est aujourd’hui dimanche, le bridge a suivi le frugal déjeuner. Nous l'interrompons à 2 heures pour aller assister à la distribution des cadeaux de Noël aux petits alsaciens ; une séance récréative doit agrémenter la réunion, nous sommes fort curieux d'entendre ces petits écoliers tard venus à la langue française. Nous ne nous doutons guère de la poignante émotion qui va nous étreindre tout à l’heure. Le commandant nous précède vers la salle de classe. Nous faisons la connais sance de l’instituteur, un fort aimable sergent de territoriale auquel la guerre a permis de rentrer en Alsace et d'un vieil alsacien très sympathique qui vient de D donner des leçons de musique aux enfants. C’est un bon et alerte vieil lard, le menton orné de la traditionnelle barbiche blanche, un ruban violet à la boutonnière. Le commandant préside flanqué des deux maires des pays asso ciés, deux fortes figures de paysans ru des et sévères ; ils ne- bougeront ni ne parleront de toute la séance. Au mur, au-dessus d’un portrait du Président Poincaré, un Christ semble étendre ses bras sur l'assemblée ; d’un...