Extrait du journal

NDRE GIDE est mort. Les journaux, heure par heure, ont tenu le public au courant de son agonie, des détails .macabres de l’ultime exposition, de la mise en terre. On ne démêle que trop bien dans cette indécente curiosité les vices d’une presse ignoble, qui, pour étouffer le goût de la vérité et de l’information loyale, multiplie le scandaleux et le sensationnel. Et si, d’aventure, perce une note de piété fidèle (car rien ne saurait être rien absolument : ni tout bon, ni tout mauvais), cette piété s’égare, qui croit retrouver dans un cadavre le souvenir d'un homme ; cette fidélité se laisse prendre en défaut, qui oublie ce que Gide écrivait de lui-même, dans une clinique de Nice, en mai 1949 : « Spiritualiste à un point qui n'est pas croyable, il n'a jamais été prier ou pleurer, ou méditer sur la tombe de ses parents. Car cela remonte loin cette insouciance de la matière qui fait qu’elle ne retient pas ses regards. C’est comme s’il n’y croyait pas. Je dis « il » ; mais ce « il », c’eut moi (...). Je ne songeais même pas à veiller au chevet de ma femme morte : A) elle était non seulement ce que j’aimais le d’hui) que c’est en fonction d’elle que...