Extrait du journal

Une chose m'étonne malgré sa banalité, c’est l’inconséquence de la gent ytarde. Ces ouvriers (je ne fais allusion qu’à ceux qui ont quelque conscience de leurs droits) réclament avec ardeur, en dehors de cette période exceptionnelle, la suppression des parasites et des intermédiaires. S'ils fondent des coopératives, c'est avec l’espoir d’arriver, autant que faire se peut, à produire ou à échanger, pour leur compte, directement. S'ils se groupent en syndicats, c'est afin d’opposer une digue aux accaparements patronaux, de limiter le fléau avant de le détruire tout à fait. Eh bien, ces mêmes prolétaires raisonnent cl une façon très différente en temps d’élection : troublés par l'atmosphère ambiante de ces jours d’orage, ils adorent alors respectueusement ce qu’ils ont toujours fait profession de brûler. Ils ne parlaient auparavant que de gérer leurs affaires eux-mêmes et voilà qu'aujourd’hui, piqués par je ne sais quelle tarentule, ils s’empressent d'abandonner tout pouvoir pour traiter de leurs intérêts à un mandataire, conseiller municipal ou député....