Extrait du journal

Tronquée d'abord par sa déchéance prématurée, puis par la brièveté même de sa vie, son oeuvre n'est pas très importante par le volume et la qualité qui, en matière d'art, prime la quantité, y reste elle-même fort mélangée. Son chef-d'oeuvre, Boris Godounow, dans la suite assez décousue des scènes qui le composent, en offre de magnifiques, soit par l'exultation du sentiment populaire, comme celle du couronnement, soit par la profondeur de l'accent, comme la première scène du moine Pimène et les grands monologues de Boris : elles voisinent avec nombre d'épisodes d'un mouvement beaucoup plus factice et d'une expression flottante. La Khovantchina reprend la poétique de Boris sans y rien ajouter, sans même en retrouver la force première. L'infernale Nuit sur le Mont-Chauve, deux ou trois des Chants et Danses de la Mort, l'amusant cahier des Tableaux d'une Exposition (où j'aime surtout la majestueuse « Porte de Kiev » et le mélancolique « Château de Clarens »), Sans Soleil, voilà l'essentiel, à quoi je n'ai jamais pu égaler les Enfantines, dont l'enfantillage m'a toujours paru d'une puérilité un peu laborieuse. Au risque de scandaliser plus d'une bonne âme, je serais tenté de trouver, pour dessiner ou résumer l'enfance, un trait plus léger, plus net et somme toute plus spirituel dans Ah!vous dirais-je, maman....