Extrait du journal

I Dans la forêt chantante aux souffles infinis, Où rit le friselis léger des sources claires, Parmi l’émoi naissant des ciels crépusculaires, Un arbre s'est adressé plein de voix et de nids ; Un arbre aux frondaisons larges et merveilleuses Avec des pans d azur pris entre ses rameaux, Surgi comme un géant dans le taillis d’ormeaux, Plus puissante le cèdre et plus vert que testeuses ; Un arbre à l’ombre fraîche où tremblent des c’arts Lambeaux de soie et d'or tombés des treuilles blondes, Reflets changeants depuis dans les moissons profondes, Epanouissement radieux des étés ; Un arbre, que l’éveil des aubes incendie Et que les nuits d’avril enveloppent d odeurs, Nid de baisers, berceau de frissons maraudeurs, Où dort le souvenir des refrains d’Arcadie : Tel, dans l’immensité fugitive du Temps, Qui verse au sablier l’oubli des heures brèves, L’Aède s’est dressé pour la gloire des rêves Comme l'arbre orgueilleux aux feuillages chantants e L’Aède aux yeux gonfles de tendresse et de joie, Ouverts sur l’horizon des plaines et des mers, Qji nous parle d’amour, quand les soirs sont amers Qui nous berce d'espoir, dès que l’aube rougeoie ; L’Aède au front taillé dans le marbre et l’airain, Large coma e une voile où le vent tend son aile, Vibrant a u us les bruits de la vie éternelle ; Aux rythmai s des flots bleus fouettés du vent marin, Aux récits de légende, aux splendeurs disparues, Auxfarouch sapp.lsdu cor, aux mille voix Qui peuplent les rayons et les ombres des bois, Aux rires, aux sanglots dont frissonnent les rues ; L’Aède surhumain, qui remplit l’infini De ses sonorités en strophes cadences, Robuste moissonneur du sillon des pensées. Grand comme Ruy Gomcz et fier comme Hernani ; L'Aède aux vers de bronze, aux rimes argentines, qui fut l’enfant sublime et qui fut l'exilé Et qui marcha vivant dans son rêve étoilé Parmi l'or espagnol et les pourpres latines....