Extrait du journal

Le premier devoir d’un Etat devrait être, a ce qu’il me semble, d’assurer le respect de son chef. D’où vient que, chez nous, un principe aussi élémentaire soit à ce point méconnu? D’où vient qu’une certaine quantité de gens, qui se disent républicains, travaillent avec acharnement à détruire l’autorité qui s’attache à la plus haute fonction de la République ? Il y a des limites à tout, et, si libéral que l’on soit, il faut bien admettre que toute liberté excessive est inconvenante. Certes, j’accorde volontiers au pamphlétaire le droit de n’épargner personne et d’être injuste même, mais cela à la condition qu’il ait de l’esprit. Son esprit me répond de son tact, et, pour être drôle, il ne devra jamais être grossier. Rien n’est insupportable comme un balourd qui se croit tout permis. Or, nous assistons tous les jours au spectacle indécent de quelques balourds s’essayant à déconsidérer un homme que le libre vote des Chambres a élevé à la magistrature suprême du pays. Cet homme, devenu ainsi le premier serviteur de la France, et qui la représente aux yeux du monde, devrait, de par les mérites de sa vie probe, la longue dignité de sa carrière, jointes à une grande bienveillance naturelle et à une modestie charmante, inspirer le respect et la sympathie de tous. J’ajoute que c’est bien Là le sentiment qu’il inspire à la plupart. Mais il n’en est pas moins vrai qu’une bande de braillards, suivis par quelques milliers de naïfs qu'ils abusent, parviennent à créer, à son égard, dans certains milieux, une agitation hostile. Quelle est la raison de cette campagne ardente ? La raison en est celle-ci que les adversaires de M. Loubet ne lui pardonnent point de n’avoir pas continué les traditions de M. Félix Faure, de n’avoir pas, comme lui, apporté d occultes entraves a la révision du procès Dreyfus,, d’être resté impartial et d’avoir, respectueux du droit, laissé la justice faire son œuvre, libre de toute entrave....