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Le Petit Caporal, 29 août 1892

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Le Petit Caporal
29 août 1892


Extrait du journal

Rien de plus édifiant que cette grève de Carmaux. Un ouvrier M. Calvignac investi des fonctions de maire, néglige l’atelier où il travaille d’nne façon très irrégulière, sous prétexte que ses occu pations municipales absorbent ses journées, On l’avertit à plusieurs re prises. 11 ne tient aucun compte des avertissements du directeur de la compagnie et va jusqu’à déclarer « que si on ne lui laisse pas deux jours en tiers par semaine pour ses aflaires de la mairie, il les prendra lui même. » Dans ces conditions, on lui signifie sa huitaine et le conseil d’administra tion de la compagnie sanctionnne cette mesure. M. Calvignac, alors, fait inter venir les ouvriers, ses camarades, et, par deux fois, des délégations de mi neurs viennent demander —- d’un ton assez rogue - la réintégration de leur maire. Repoussés avec perte, les ouvriers excités en dessous, font irruption dans le cabinet directorial et, des menaces de mort à la bouche, réclament la dé mission de leur directeur. Cédant à la torce, celui-ci s’exécute, mais tout naturellement la compagnie ne sanctionne en aucune manière cette concession inopportune. De là fureur des ouvriers et leur mise en grève. Ce petit historique était nécessaire pour bien montrer la situation. Elle se présente ici sans obcurité et nous avons tout lieu de la juger impartialement, la cause étant d’une simplicité enfantine. Nous n’avons nas pour habitude de soutenir les patrons toujours et quand même. Au contraire, nos sympathies vont la plupart du temps aux travail-/ leurs dont le rôle est beaucoup trop , d’enrichir, sans qu’ils en soient récom- j pensés, quelque industriels de haut vol. Mais dans les circonstances présen tes, les ouvriers ne nous paraissent guère intéressants, et encore moins M. Calvignac, le maire-ouvrier de Carmaux. Une compagnie d’exploitation ne doit à aucun titre, parce qu’un de ses em ployés fait de la politique, le traiter avec des égards spéciaux. Appointe, comme les autres, il est tenu comme eux à l’obéissance et à la régularité dans le travail. S’il réussit à concilier son mandat municipal avec les exigences de sa be sogne journalière, rien de mieux, et une compagnie serait mal venue de renvoyer un de ses ouvriers pour la seule raison qu’il fait de la politique en dehors de l’atelier. Mais si son travail rétribué souffre, s’il le néglige en faveur de la mairie, alors la compagnie a non seulement le droit, mais encore le devoir, de le faire opter entre la mairie et l’atelier. M. Calvignac ne peut en toute justice, rien réclamer. Il ne saurait exiger, de la part de la Compagnie, un recul qui, pour l’avenir, deviendrait gros de con séquences. La politique, aujourd’hui, se glisse où elle n’a que faire. Sous le fallacieux prétexte qu’un conseil d administration compte un ou plusieurs députés réac tionnaires, on voudrait bien, dans un certain milieu, faire admettre comme règle générale que les torts, en cas de conflit doivent incomber au patronat, à la direction. Si ces d étestables tendances s’accen tuaient encore, on arriverait assez vite à ce résultat, la fermeture des grandes maisons, le chômage des grandes en treprises. Si les patrons ne sont plus soutenus dans leur bon droit, ils met tront comme on dit vulgairement la clef sous la porte. Et alors qui sera le plus avancé, des ouvriers ou des patrons? Ces derniers, on le présume d’avance, ne seront pas pour cela réduits à la misère, tandis que les premiers, sous peine de mou rir de faim, ne sauraient indéfiniment rester sans travail. C’est la lutte du pot de terre contre le pot de fer. Et, quoi qu’on fasse ou qu’on tente de faire, on ne pourra ja mais se passer de capital et il y aura toujours des chefs. La coopération, elle-même, suppose des directeurs habiles et énergiques. Rien ne peut être édifié de durable sans J...

À propos

Le Petit caporal était une feuille politique financé par le parti bonapartiste L'Appel au peuple et dirigée par François Perron. En 1877, choquées par la violence des propos de celui-ci, les autorités du parti confièrent la direction à un homme moins turbulent, Jules Amigues. Le journal, affichant pendant plusieurs décennies des tirages à quelque 20 000 exemplaires, fut publié jusqu'en 1923.

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