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Le Petit Courrier de Bar-sur-Seine, 14 juin 1907

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Le Petit Courrier de Bar-sur-Seine
14 juin 1907


Extrait du journal

Quoi qu’il advienne, finalement, de cette agitation ou de cette révolte du Midi vinicole, on ne saurait oublier qu’elle s’est produite dans une région qui a été comblée de faveurs gouvernementales et où tout principe d’auto rité, voire de respect des lois, a presque disparu par suite de la faiblesse des divers ministères et de leurs agents. Voici plus de dix ans, — et surtout depuis le passage aux affaires de M. Combes, — que les habitants des quatre départements révoltés, aussi bien que leurs voisins, du reste, ont pris l’habitude de tout voir céder devant eux. Les mots, comme on le sait, là-bas, n’ont qu’une valeur relative : le mot de socialisme a été adopté dans tout le Midi comme une étiquette destinée à couvrir toutes sortes de marchandises — et toutes sortes d’abus. Dans les plus petits bourgs, se sont constitués des comités électoraux, qui, sous le couvert do cette étiquette, ont mis en état de servitude l’élu de leur choix, porteur du même fanion rouge. — Cet élu s’est fait, à la sous-préfccture, le porte-parole des ambitions, des haines, des revendications les plus absurbes; il a ensuite exercé sur le préfet, sur d'autres hauts fonctionnaires, sur les ministres enfin, la môme « dictature de l’épouvante ». N’était-il pas « socialiste », unifié ou non selon ses intérêts, c’est-à-dire muni de cette panacée imbécile qui doit s’appliquer, indis tinctement, à tous les maux? N’était-il pas en mesure de « faire marcher » son groupe, de déchaîner des orages parlementaires? Son vote, la fidélité de son Adhésion à la fameuse délégation des gauches étaient le prix do concessions incessantes, la récompense des lâchetés de tous les représentants d’un pouvoir tombé en quenouille. Et c’est ainsi qu’à l’aide de compromissions et de combinaisons succes sives, le ministère vivotait et se tirait d’em barras ; c’est ainsi que l’administration, à proprement parler, n’existait plus, abdiquant peu à peu entre les mains crochues et cyniques de cette série de délégués avides du retentis sant socialisme méridional. On vil, de cette manière, se produire durant une seconde, puis disparaître, étouffés, les plus abominables scandales. L’interpellation de M. Brousse en a révélé quelques-uns, de diverses natures. La magistrature, les agents de la Régie, les préfets et sous-préfets y jouaient des rôles également blâmables ; ils fermaient les yeux sur ces fraudes contre les quelles ces mêmes méridionaux, M. Ferroul en tète, protestent tant, après en avoir tant bénéficié. On connaissait, on cite, dans le pays, les noms de ces gros fraudeurs qui ont obtenu des grâces ou des transactions avanta geuses, au prix desquelles ils continuaient tranquillement leurs pratiques. La complicité des Loges, des Comités, des Délégations, etc., les protégeait et elle leur permcltait encore de tripatouiller impunément les élections, d’élire qui bon leur semblait, de molester les « ealotins » et les « suppôts de la réaction ». Aux poitrines, s’accrochaient les rubans d’of ficier d’académie et les « places » à Paris ou dans la région même, n’élaient attribuées qu’à des amis. Etre « de ce Midi », c’était pour un jeune Français la meilleure garantie d’a venir. Toute cette comédie attristante, celte pa rodie d’un gouvernement démocratique n’a pourtant pas suffi à apaiser les appétits. Palmé, nanti ne prébendes, mis à l’abri des lois et n’ayant presque rien à redouter de ses magis trats, le Midi vinicole, de plus en plus « so cialiste » à la suite de M. Ferroul, exige, ce pendant, aujourd’hui, quelque chose encore. 11 veut que l’Etat « lui fasse vendre son vin », à l’exclusion de celui de la Bourgogne ou d’ailleurs ; il a tellement pris la coutume d’être hors la loi qu’il nargue, maintenant, ouverte ment, celle-ci, et il fait savoir à la France entière qu’il se met tout à fait au-dessus d’elle ! Griserie du verbe, — griserie comique, si l’on veut, mais à coup sûr griserie coupable de la part de ceux qui l'ont tolérée......

À propos

En 1841, Le Petit Courrier de Bar-sur-Seine prend temps la suite de la Feuille d'affiches, petite gazette spécialisée dans les annonces et les avis divers du village de Bar-sur-Seine, dans l'Aube. Devenu titre hebdomadaire – puis bihebdomadaire à partide de 1885 –, le journal disparaîtra en 1916.

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