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Le Petit Parisien, 22 avril 1932

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Le Petit Parisien
22 avril 1932


Extrait du journal

Berlin, 21 avril. DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL La campagne électorale en vue du scrutin de dimanche, qui battait son plein en province depuis plusieurs jours, commence à déployer aussi son activité à Berlin. Cette activité est, à la vérité, assez peu visible, car les partis ont dépensé tant d'énergie et d'argent pour l'élec tion présidentielle qu'Us manquent maintenant de souffle et de moyens pour soutenir ou intensifier encore leur propagande. En fait d'affiches, on n'aperçoit sur les colonnes et sur les murs que ce qu'on est habitué à voir ailleurs en pareil cas. Les agitateurs des partis qui se défendent ont porté, semble-t-il, leur principal effort sur des assemblées fermées, moins coûteuses, et où ils espèrent plus commodément travailler leur auditoire que dans un meeting en plein vent. Les socialistes, le centre, les deutsch nationalistes rivalisent de zèle, ne per dent pas leur temps ils me l'ont du moins assuré mais les méthodes de persuasion qu'ils emploient ne me paraissent guère susceptibles de réus sir particulièrement dans ce pays et en ce moment. La masse allemande est actuelle ment peu accessible au raisonnement. Elle souffre de la crise économique et, ne voyant aucune amélioration poin dre à l'horizon, se trouve pour une forte part en proie à une sorte de dé sespoir collectif. Jamais le dicton « Ventre affamé n'a pas d'oreilles > ne fut plus juste que dans l'Allemagne de 1932. En 1930, en 1931 encore, la misère de certains était peut-être plus grande, mais la prolétarisation générale n'était pas un fait accompli. Aujourd'hui, ce processus est achevé. L'Allemagne, qui était autrefois le paradis de la classe moyenne, est devenue un purgatoire ou 25 millions d'êtres qui travaillent et mangent à moitié poussent des cris de malédiction. Cette prolétarisation, ou est bien obligé de la constater. Elle est par tout, elle crève les yeux. Pour qui connaît ce pays depuis les temps fas tueux du kaiser et qui a observe les diverses phases de l'évolution de i'Alle magne depuis la guerre, c'est un éton nement dé tous les instants de voir l'Allemagne tombée si bas.La « pauvre Allemagne » n'est plus une légende, mais, hélas ! une réalité, une Réalité, faible politiquement, mats menaçante au point de vue sooiai. La masse allemande, dans son dénuement et dans son amertume, commence à ressembler étrangement à la foule so viétique. Elle commence aussi à en avoir l'audace et le 3 instincts. Ce n'est pas le moment de recher cher les origines de cette pénurie. Mais on ne saurait la nier. L'Allema gne a perdu sa force morale et sa belle santé. Elle est en déséquilibre. Elle n'a ni l'envie ni, pour le moment, la possibilité matérielle de se battre, mais elle .est désemparée et déçue comme elle ne l'a jamais été. Et l'on devient quelque fois insolent par excès de désespoir. J'ai demandé à des amis allemands que je connais depuis longtemps : Comment expliquez-vous les suc cès foudroyants de Hitler, qui ne pa rait pas être un génie et n'a. au sur plus, jamais pu préciser ce qu'il pour rait offrir de positif à ce peuple avide de meilleur ?...

À propos

Le Petit Parisien est un grand quotidien français, publié entre 1876 et 1944. Il était l’un des principaux journaux sous la Troisième République.

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