Extrait du journal

On pourrait s'étonner d'un tel changement. Il marque une véritable révolution dans les principes dont les Anglais s'étaient inspirés pour développer et assurer leur ancienne richesse. Sans doute, depuis la guerre, le libre-échange avait subi, en Angleterre, des atteintes sérieuses, diverses et répétées mais on sentait, dans la nation, comme une répugnance instinctive à s'en éloigner trop délibérément. Aujourd'hui, Le pas est franchi, et il l'a été avec vivacité. L'importance de cette décision nationale prend d'autant plus de relief qu'en fait la baisse de la livre sterling, entraînant une baisse consécutive du prix des marchandises britanniques par rapport au prix des marchandises étrangères, assure déjà à l'industrie anglaise une protection qui la dispenserait de recourir à l'artifice des droits de douane. A vrai dire, contrairement à l'idée que s'en font encore beaucoup de gens, il faut considérer la volte-face économique et monétaire de l'Angleterre depuis quelque temps, non comme le signe d'accidents passagers, mais comme la conséquence d'une détermination, plus ou moins précipitée sous la pression des événements. Ce n'est pas par une erreur technique, ou par simple lassitude que les Anglais ont abandonné leur ancien système. On sait qu'ils ne manquent ni de ténacité ni d'esprit de sacrifice à l'égard des exigences supérieures de leur nation. S'ils ont changé de système, c'est que l'ancien système, épreuve faite, leur apparut comme condamné par l'expérience et sans avenir. Le libreéchange est un système qui dépend, en effet, non d'une seule nation, mais de toutes ou, du moins, de la plupart. Or presque toutes les nations avaient pris le parti opposé, celui du protectionnisme....