Extrait du journal

familière, qui est belle, accueillante, amusante, émouvante. Elle est capi tale et elle est « province », dans la bon sens du mot» Elle est grande, populeuse, animée; avec ça, elle a tout de même son petit côté sous préfecture... Une sous-préfecture de cent vingt mille habitants !... J'ai voyagé... J'ai assez voyagé pour posséder la pleine certitude qu'il n'est pa3 dans le monde de pays qui vaille la France. J'ai con templé un certain nombre de paysa ges fameux et lointains. Mais, de vant ces splendeurs réputées de la nature, j'ai toujours pensé aux merveilles de chez nous, si douces, si harmonieuses, si mesurées, si complètes. J'ai voyagé... Je ne connais rien de comparable au Carré du Port de Toulon. De nobles pierres élè vent, devant les eaux dormantes, une façade puissante et sévère. La façade, par le sérieux de sa ligne, est « vieille France ». Mais elle est tendrement méridionale et ingénu ment moderne dans son arrange ment. Un piano mécanique gémit au fond d'un petit bar or trois ou quatre matelots boivent l'anisette. Une terrasse de café, bavarde et multicolore, assemble des officiers, des touristes et des fonctionnaires. Une devanture de magasin retient des flâneurs nonchalants. Un res taurant dresse une ribambelle de petites tables inviteuse3, toutes de blanc coiffées, et promet à tous les passants une bouillabaisse qui ne saurait se dispenser d'être une « spécialité recommandée ». Et l'eau est là, la mer, au bout des terras ses, devant le petit bar, devant les vitrines, devant les soucoupes de l'apéritif l'apéritif, dans le Midi, se prend à toute heure devant les bouillabaisses. L'eau et le sol ne font qu'un. On se demande si les boutiques ne baignent pas dans les flots bleutés et réjouis. On se de mande si les petits vapeurs de Tamaris et des Sablettes, si vieillots «t si cordiaux on dirait qu'ils...