Extrait du journal

La belle page des élèves d'Alfort fut au pont de Charenton, qu'ils défendirent avec un superbe entêtement; quelque formidable que fût le flot des colonnes ennemies. L'un d'eux, Jean Pigeon, dont la tombe a été conservée, eut une mort de héros. La plupart des élèves étaient encore des adolescents, et ils n'étaient soutenus, comme troupes de ligne, que par des conscrits. Ils avaient affaire à de solides bataillons wurtembergeois. Pourtant, ces enfants, qui voyaient le feu pour la première fois, firent payer cher à l'ennemi le passage du pont. A la barrière du Trône, les élèves de l'école polytechnique s'étaient ralliés, sous la direction du commandant Evain. Ils se firent les artilleurs de vingt-huit pièces qui, dans la confusion des ordres, avaient été oubliées, de sorte qu'elles n'avaient ni servants ni attelages. Les attelages, on les improvisa avec des che vaux de fiacre et de charrettes. Avec ces batteries, les polytechniciens tentèrent de barrer la route à une colon ne russe. Leur ardeur suppléait à leur peu d'expérience. Malheureusement, les munitions ne s'appropriaient pas toutes aux pièces, dont quelques-unes furent ainsi rendues inutiles. Sur l'attitude résolue de ces élèves de l'Ecole, il existe un témoignage qui ne peut être taxé de complaisance : c'est celui d'un étranger, le capitaine Unter wood, qui, prisonnier de guerre depuis plusieurs années, avait été autorisé, vers la fin de l'Empire, à séjourner à Paris. En militaire qu'il était, il admira leur conduite, et il revint plusieurs fois sur le sentiment d'émotion qu'il avait éprou vé. Ce n'était pas seulement au péril du...