Extrait du journal

J’ai beaucoup connu autrefois un pauvre diable de fou qui a laissé d'extraordinaires souvenirs dans le département du Vaucluse. C’était un ancien prêtre. Un jour, il s’était imaginé qu’il était un nouveau Christ. Là-dessus le voilà qui part tout revêtu d'une tunique rouge, le Iront couronné d’épines, un bout de roseau dans la main. Dans cet étrange costume, il s’floc comme victime expiatoire aux bonnes gens qui passent et il demande qu’on le crucifie séance tenante. C’est un service qu’on se refuse tout naturellement à lui rendre pour des motifs sur lesquels il n’est pas nécessaire d'insister. Ce refus l’irrite au plus haut point et il ne tarde p: s à déclamer dans les carrefours contre celle misérable et ignorante humanité qui n’a pas voulu se laisser sauver. En dépit de sa démence, il reste érudit, n oublie rien de ses vieilles étirées et cite volontiers des textes laliii.-'ou grecs: mais ce qui domine en lui, c’est la rage d"ergoter philosophiquement. C’est ainsi qu’il trouve luimini une explication à sa folie. 11 ne ht conteste pas, il est tout le premier à la reconnaître. Seulement voilà, sa jolie u’est pas celle de tout le monde : elle constitue ce qu il appelle la folie raisonneuse....