Extrait du journal

Septembre le dispute jà mal pour le charme, encore qu’il voie la fin de bien des choses, comme la fin des vacances de la jeunesse et le dépouillement do la parure de la terre. On peut même dire que son charme est moins décevant et qu’il tient mieux ses promesses. L’allégorie le représente sous une figure souriante, couronné de pampres, tenant d’une main le signe de la Balance et, de l’autre, une corne de la chèvre Amalfhée pleine des fruits de la saison. Avec lui, la moisson finit dans les pays du Nord et, dans les pays du soleil, les vendanges commencent. C’est dans un paysage de Septembre, en Artois, parti cipant de la chaude coloration de l’été et du charme vaporeux de l’automne, que Jules Breton, le grand peintre-poète, a fait mouvoir sa « Glaneuse », son chefd’œuvre peut-être, qui fait son stage de purgatoire au musée du Luxembourg en attendant quo le Louvre lui soit ouvert. Au bas, il avait écrit : Les cheveux dans le vent, Se mêlant à la glane, Voici la grande Jeanne Au coigps souple et mouvant Cest dans un crépuscule de Septembre que, se relevant de terre, une main ap puyée sur la houe, les paysans do Millèt se découvrent, tandis que tinte V « Angé lus » du soir, là-bas, au clocher du vilîage. La douceur de Septembre passe ainsi à l’âme qu’elle rend plus douce et plus apaisée. A en jouir on fait soi-même pro vision de tendresse ou tout au moins de meilleure grâce ; à regarder ce que l’on peut appeler déjà le soir de l’année, on fait provision pour le soir de sa vie, qui ne tarde guère, même pour les plus jeunes, de sagesse, de calme, de recueillement. Le renoncement, le détachement suprême nous viennent à l’esprit rien qu’à voir les champs dépouillés de la robe blonde de leurs blés, à regarder ces vignes qui le seront bientôt de leurs pampres et de leurs grappes mûres, cette frondaison qui va pâlir, ces feuilles qui vont faire tout à l’heure le tapis des feuilles mortes. Cette petite fumée qui monte là-bas, de la hutte de terre et de branchages du bûcheron qui s’installe pour la coupe pro chaine de l’arbre, est aussi un symbole de la caducité de Villasion de la via Le col chique d’automne, la « veilleuse », est également un signe : nous voilà loin de I’aspérale odorante, du muguet des bois 1 Puis ce sera la saison des perce-neiga Résignons-nous, d’autant plus que nous avons encore devant nous, jusqu’à l’été de la Saint-Martin, de belles journées en core, celles que cette année si avare et si maussade nous redoit pour faire notre compte de soleil et de belle lumière. D'ailleurs Septembre a aussi sa poésie^ de la vie et du mouvement Par nos rou tes poudreuses, la belle jeunesse de Fran ce s'en va, la chanson du troupier aux lèvres, l'air crâne, s’entraîner au Jeu de la guerre, « ludus pro patria ». Le garde champêtre légendaire a fini d’ouvrir la barrière symbolique de l’image et toute la gent guêtrée des cinq ou six cent mille chasseurs en règle avec la loi se préci pite au travers, impatiente de faire par ler la poudre. Plus calme, le pêcheur s'en va à pas lents le long du chemin du bord de l’eau, 11 se sourit à lui-même, Septem bre est inscrit en lettres d’or sur son car net C’est le meilleur de l’année pour la pêche. Le temps s’est rafraîchi, souvent le ciel se couvre de ces légers nuages pleins de promesses pour le succès de la journée^ et d’une journée bonne de la fine pointe de l’aube jusqu’au coucher du soleiL Dans les eaux les plus hautes, le poisson auquel la canicule avait lait per...