Extrait du journal
Les journaux nous ont appris ces temps derniers qu’un chimiste aurait découvert le moyen de fabriquer de l’or. Du moins, il l’assure et ce serait, en ce cas, une bon ne affaire pour sa bourse, mais on peut se permettre de conserver quelque doute sur la valeur de son affirmation. Certes, il ne faut pas, de parti pris, nier le progrès et, par le temps qui court qui ajoute chaque jour une découverte à tou tes celles qui font la gloire de notre siè cle, il faut sc garder d’imiter M. Thiers — pour ne citer que celui-là — 'Ml Thiers, qui n’était pas un sot cependant, et qui nia la possibilité de construire les chemins de fer. En principe, il faut admettre que tout est possible à une époque qui a vu créer le téléphone, le télégraphe sans fil et l’aéroplane. Cependant, la fabrication des pierres et des métaux précieux nous laisse toujours un peu sceptiques, peut-être par ce que pas mal de filous ont exploité de puis quelques années cette mine, au grand dommage de quelques naïfs fortunés. Quoi qu’il en soit, nous attendrons de mieux connaître les résultats des recher ches de notre alchimiste moderne pour avoir une opinion sur la valeur de son in vention. Peut-être lui sera-t-elle moins pro fitable que celle de la « salière porte-ci gare », du « portemanteau à musique » ou des mille petits objets plus ou moins utiles pour lesquels des industriels ingé nieux prennent brevet chaque semaine. Ce ne sont pas en effet, les découvertes les plus considérables qui rapportent le plus à leurs auteurs. On cite des inven teurs qui réalisèrent des fortunes colos sales avec des accessoires »1e toilette ven dus quelques centimes. C’est le cas de celui qui lança l’épingle-nourrice, sans faire pour cela le moindre effort d’imagi nation. On assure, en effet, qu’il avait trouvé le modèle sur une fresque de Pom pé! ; il eut simplement Vidée géniale de la faire breveter et. gagna ainsi plus de soixante millions. Le commerçant qui créa le col en ha leine, pour les corsages féminins, col dont la monture a été remplacée depuis par de la plume ou des tuteurs plus légers enco re, a fait une fortune énorme. De même celui qui pensa à fabriquer des garnitures métalliques se fixant à la pointe et au ta lon des souliers pour les préserver de l’usure a réalisé pendant longtemps plus de six millions de bénéfices annuels. Les inventeurs de talons en caoutchouc ont également gagné à la réalisation de leur idée si simple, mais à laquelle il fallait penser, des sommes considérables. Le commerçant qui ressuscita le diabolo et eut le sens pratique de le faire breveter a fait fortune pendant les quelques années durant lesquelles ce jeu de nos ancêtres fit fureur avant de retomber dans l’oubli. Pour rester dans le domaine des jouets, le patin à roulettes a rapporté cinq millions au propriétaire de son brevet. L’inventeur de la balle munie d’un élastique a gagné pendant vingt ans plus de deux cent mille francs par an. Un très simple joujou d’en fant qui fit fureur, il y a cinquante ans : le parachute composé d’une feuille de pa pier de soie dont les coins étaient réunis par des fils, a fait gagner cent cinquante mille francs à un camelot parisien qui l’avait imaginé. L’inventeur des ballons en celluloïd dont on fait usage pour les illuminations, a gagné cinq millions et réalise encore chaque année de sérieux bénéfices malgré la concurrence. On le voit, il n’est point nécessaire de réaliser des découvertes savantes pour en tirer les plus gros bénéfices et si l’on com pare le sort de l’inventeur de la plume d’acier ou de l’épingle de sûreté dont nous parlions tout à l’heure, qui gagnèrent des fortunes énormes sans avoir eu à entre prendre aucune étude préalable ni à ris quer aucune dépense pour l’exécution d’un modèle, et celui de Charles Bourseul qui inventa le téléphone vingt-cinq ans avant que l’Anglais Graham Bell ne tirât parti de cette invention et qui mourut pauvre et à peu près ignoré, on est bien forcé de reconnaître que le génie n’est pas, en France, ce qui rapporte le plus. II est malheureusement notoire que, cheZ nous, les grandes inventions conduieent plus souvent leurs auteurs à la mi...
À propos
Le Progrès de la Côte-d'Or était un journal républicain radical basé à Dijon, fondé en 1869 par l'homme politique Joseph Magnin, conseiller municipal de Dijon puis membre éminent du gouvernement de la Défense nationale et enfin sénateur innamovible. Grand titre de presse régional, il cessera finalement de paraître à la Libération, en 1944 comme la plupart des journaux ayant continué de paraître sous l'Occupation.
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