Extrait du journal

Il résulté de cet envahissement de la fiction dans nos mœurs, que chacun de nous s’est compose à son insu mie double existence; l’une spis s’écoule entre nos amis et nos proches pareils , l’autre parmi les connaissances des deux sexes, closes du cerveau des romanciers. F.t il arrive qu'on ne sait plus laquelle des deux existence* est vraie , laquelle des deux est fausse. Dans les livres, on nous décrit les gens avec un soi» de détails si minutieux, nous en savons si long au bout de quelques pages, sur les habitudes, le temperammeut , le genre de vie, les inclinations secrètes, la fortune, l’esprit, le caractère des héros de la fantaisie, (pie les habitas du monde réel nous paraissent fades et sans saillies auprès d’eux. Nos plus intimes amis sont des énigmes vivantes à côté des autres. Eli! quel ami intime voudrait vous initier à tous les secrets de ses nippes, à toutes les misères de son organisation ? Etres bigarres que nous sommes ! nous oublions l'homme de chair et d’os, qui nous a serre la main, il y a une heure, et nous sommes incessamment obsèdes par le héros de M. de Balzac ou de M. Frederick Soulié. Ajoutez à cela que les personnes du roman, se montrant toujours à nous au milieu de certaines circonstances fatales qui contribuent à les graver dons la mémoire, ou est moins porte à les oublier (pie ceux qui se sont montres a nous dans le prosaïque des événement vulgaires. Il y a même des têtes faibles qui tombent à propos de ces impressions diverses dans la plus déplorable confusion. Drivées apparemment de la dose de raison nécessaire pour ne pas perdre de vue la limite qui séparé le domaine idéal de celui de la réalité, elles appliquent l’invention à ce qui est. et réciproquement, de sorte qui leur arrive en pensant et en parlant, de s’égarer dans un dédale inextricable de noms en l’air et de nom» connus, consacrés par le baptême ou consignés de père en (ils dans les registres de l’rat civil. Ils jettent Mme. de Bénissant dans les bras du lion de la localité et ne se font aucun scrupule d'avancer dans un cercle honnête, que c’est bien Madame une telle, femme d’un honnête habitant de l'endroit, spis ruine sou mari pour L» u nir aux prodigalités du M. de graillas....