Extrait du journal

de mauvaise humeur. On n'avait pas la ressource de l'appel. lit puis d'ailleurs le direcleur souverain était trop soi gneux de ses intérêts pour accepter ainsi l'oeuvre d'un inconnu. — Comment vous appelez-vous? demandait-il d'abord au solliciteur. — Philogène Patouillard. — Eh 1 mou cher monsieur, votre nom n'a figuré jus qu'à présent nulle part. Je ne puis donc pas vous accep ter. Paites-vous jouer ; nous verrons ensuite. — C'est précisément pour me faire jouer que je suis venu. Le directeur levait les épaules et répondait : — Diable ! si j'admettais ainsi toutes les élucubrations qu'on me propose, j'en serais bientôt réduit à fermer mes portes, car le public n'y passerait plus. H me faut des ta lons déjà consacrés. Et le jeune compositeur s'en retournait l'âme abattue, trop heureux si quelque éditeur voulait s'accommoder de sa partition, toute morcelée pour le piano. Quelques voix hardies s'élevèrent contre cet abus. Elles crièrent par-dessus les toits qu'une seconde scène de mô me nature était indispensable pour préparer les recrues et faire laréservede l'avenir. Elles furent enfin entendues,' Le Théâtre-Lyrique fut créé. « Sa mission exclusive consistait à produire la plus grande somme possible de noms nouveaux. Lo cahier des charges en imposait môme formellement l'obligation au directeur, lui laissant à peine la faculté de faire représenter, de loin ep loin, l'ouvrage d'une illustration, pour servir d'appât au public. Peu à peu l'on feignit d'oublier les engagomens con tractés. Lo titulaire, chargé de gérer l'entreprise pour son compte personnel, trouva plus profitable de s'adresser aux vétérans qui tous les soirs assuraient sa recette. Si quelqu'un s'avisait parfois de l'en blâmer, il faisait celte réplique éloquente : — Que voulez-vous ? il faut bien que j'agisse ainsi. Lorsque j'annonce un inconnu,, personne ne vient, et le vide se fait aussitôt. Au contraire, quand j'indique unç célébrité sur mon affiche, en lettres capitales, nous refu sons du monde au contrôle, et je suis Obligé, pour éviter l'encombrement, de mettre des barrières au guichet. Je ne nie pas que les talens ignorés ne soient dignes de toute ma sollicitude, mais j'ai des charges lourdes, et je dois, avanl tout, faire honneur à ma position. Il n'y avait rien a répondre à cela. L'administration su périeure devait fermer elle-même les yeux sur ces résul tats contraires à ses intentions. Plus de rigueur de sa...