PRÉCÉDENT

Le Siècle, 8 septembre 1854

SUIVANT

URL invalide

Le Siècle
8 septembre 1854


Extrait du journal

— A la bonne heure 1 dit Legendre avec son gros rire ; mais, comme nous De sommes encore qu'à la quatrième bouteille, sers hardiment ton digne confrère, car tu as fait tous les métiers, toi ! Tù as été boucher, maréchal ferrant, contrebandier, soldat au régiment d'Auvergne, pa lefrenier dans les écuries du maréchal de Vaux. Mainte nant, te voilà dans ta véritable sphère, marchand de vin \ tu nages en pleine eau. A boire donc, maître Petit, com me on t'appelle maintenant, ou maître Jourdan, comme on t'appelait ; à boire 1 — Eh 1 Jourdan ! cria-t-on d'un auf$e côté. Jourdan déposa la bouteillo en face de Legendre et cou rut à ce nouvel appel qui lui était fait par un personnage que nous avons déjà entrevu dans cette histoire. — Que veux-tu, mon vieil Hébert? demanda Jourdan avec familiarité ; est-ce qu'il te reste quelque petite con tremarque qu'on pourrait utiliser demain ? —Il np me reste rien, pas même ma place, attendu qu'on m'a mis ce soir à la porte des Variétés sous prétexte Mais ce n'est pas la peine de te dire le prétexte. — Et puis, dit Jourdan souriant, d'un sourire qui n'ap partenait qu'à lui, je ne suis pas curieux,, moi. — Non, mais tu es hospitalier, surtout quand on te paie... Je te préviens donc que tu auras, à partir de do main, à nous nourrir aux frais de la masse, monsieur et moi. Et Hébert montrait un homme de trente-six à trente-huit ans, maigre, jaune, à l'œil vif, et dont le costume offrait un singulier mélange de faux luxe et de misère réelle. — Qû'est-ce que c'est que monsieur? demanda Jourdan. — Monsieur est le citoyen Collot-d'Herbois, qui joue les premiers rôles de tragédie en province, et qui, $ ses heures perdues, fait des comédies. Or, comme dans ce moment-ci il ne peut ni jouer les rôles des autres, attendu qu'il est sans emploi, ni faire jouer les siens, attendu que la Comé die-Française lui refuse ses pièces, il s'adresse au club des Droits de l'homme ; et, comme tout homme a droit d'être nourri, il dit à la société philanthropique dont nous fai sons partie : Nourris-nous 1 — Il me faudra pour cela un mot du président. — Le voilà, ton mot..-. Tu vois, il est pour deux ; à par tir de demain, tu dois nous nourrir. En attendant, abreuvenous ; on n'est pas encore tout à fait dépourvu, et l'on peut payer la dépense de ce soir. Et Hébert, en riant et avec un juron amical, tira de la poche de sa culotte une douzaine d'écus qui prouvaient que, s'il avait été renvoyé de la place qu'il occupait au...

À propos

Fondé en 1836 par Armand Dutacq, Le Siécle bouleversa la presse française grâce à une stratégie éditoriale révolutionnaire pour l'époque. Comme La Presse de Girardin, fondée la même année, ce quotidien fixa son prix d'abonnement à 40 francs – c'est-à-dire la moitié de celui des autres journaux – et entrepris de compenser cette somme modique par d'autres revenus, tirés de la publicité. Traditionellement anticlérical, il deviendra l'organe de la gauche républicaine pendant une grande majorité de la Troisième République.

En savoir plus
Données de classification
  • jourdan
  • legendre
  • fournier
  • laurentie
  • petit
  • bouillaud
  • maillard
  • delamarre
  • bigot
  • hollande
  • paris
  • marat
  • espagne
  • varna
  • hébert
  • france
  • strasbourg
  • londres
  • genève
  • suisse
  • assemblée nationale
  • académie de médecine
  • union
  • ibm
  • sa voi