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Le Siècle, 22 février 1837

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Le Siècle
22 février 1837


Extrait du journal

FRANCE. PARIS, 21 FÉVRIER. SÉANCE D'AUJOURD'HUI. — LOI SUR LES CAISSES D'ÉPARGNES. La presse ministérielle sonnait ce matin le tocsin d'alarme sur la gravité inattendue que semblait prendre la discussion engagée sur l'une des conceptions financières de M. Duchâtel ; elle adjurait la ma jorité de prendre bien garde de tomber, à propos d'une question non politique en apparence, dans un piège comme celui où elle avait été prise l'année dernière, lorsque n'écoutant que l'intérêt des contribua bles, elle avait renversé sans le vouloir le ministère du 11 octobre par son obstination à réclamer la conversion des rentes. Aussi,les bancs ministériels étaient-ils au grand complet aujourd'hui; la chambre était aussi nombreuse, mais beaucoup moins attentive que dans les grands jours de luttes politiques, et il était facile de voir, au bourdonnement confus des centres, que le vote serait le résultat d'un parti pris, fort indépendant de la discussion que très peu de députés étaient d'ailleurs en état de suivre et de comprendre. Ni M. Jacques Lefèvre, qui, se voyant l'unique appui de M. le ministre des finances, a cru devoir remonter à la tribune pour répéter ce qu'il avait dit hier ; ni M. Mauguin, qui a reproduit avec son talent ordinaire les argumens invoqués contre le projet; ni M. Lacave-Laplagne, qui a paru vouloir prendre une position intermédiaire entre les partisans et les adversaires de la loi, n'ont pu triompher de l'inattention et [des bruyantes causeries de la majorité. M. Thiers seul est parvenu à se faire écouter par l'intérêt nouveau des considérations qu'il a présentées, par l'abondance et la lucidité de ses développemens. Il a fait ressortir l'identité de l'opération projetée avec celle que lit M. de Villèle en instituant le syndicat des receveursgénéraux, qui devint une maison de banque et de spéculation dont l'influence sur la bourse suscita de justes et unanimes réclamations, et qui, supprimée en 1830 sur la clameur publique, termina sa car rière de cinq années par une liquidation désavantageuse, par une sorte de faillite. Toute cette partie de la discussion de M. Thiers a été fort claire, entraînante; mais l'orateur nous a paru moins bien inspiré lorsqu'il a voulu indiquer les moyens de faire cesser les stagnations de fonds oné reuses au Trésor. « Augmentez la dette flottante, a-t-il dit; créez une » plus grande masse de bons royaux. » Nous pensons aussi que laquantité de ces bons en circulation est beaucoup trop restreinte; mais pour l'augmenter, comme l'a dit avec raison M. Duchâtel, il faudrait aug menter les dépenses. M. Thiers a voulu dire sans doute qu'on pouvait mettre à la charge de la dette flottante les travaux publics projetés, au lieu de les payer avec la réserve de l'amortissement; mais alors que fera-t-on de cette réserve, qui viendra s'ejouter aux fonds stagnans dans le Trésor. M. Garnier-Pagès a indiqué un moyen beaucoup plus rationel : ce serait d'appliquer les capitaux surabondans au remboursement des cautionnemens en numéraire, lesquels seraient remplacés par des cautionnemens en rentes. On aurait ainsi l'emploi utile et assuré de 225 millions, et l'on dégrèverait le budget d'une charge annuelle de 9 mil lions. Ce serait là certainement une bonne opération; mais nous croyons que dans l'ordre des améliorations que doit accomplir le dé partement des finances, celle-ci ne doit venir qu'après la conversion des rentes 5 pour cent. Car c'est toujours là qu'il faut en venir, quand on s'occupe de re médier à la situation anormale du Trésor. La conversion seule peut placer nos budgets dans un véritable équilibre, débarrasser les canaux engorgés de la circulation financière, dégager le fonds d'amortisse ment de l'hypothèque sacrée que conservent sur lui les créanciers du 5 0|0 jusqu'à la liquidation de cette partie de notre dette, et nous per mettre à la fois de respecter et de maintenir les principes du crédit,...

À propos

Fondé en 1836 par Armand Dutacq, Le Siécle bouleversa la presse française grâce à une stratégie éditoriale révolutionnaire pour l'époque. Comme La Presse de Girardin, fondée la même année, ce quotidien fixa son prix d'abonnement à 40 francs – c'est-à-dire la moitié de celui des autres journaux – et entrepris de compenser cette somme modique par d'autres revenus, tirés de la publicité. Traditionellement anticlérical, il deviendra l'organe de la gauche républicaine pendant une grande majorité de la Troisième République.

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